Dans le bouillonnant et foisonnant paysage des musiques qualifiées de « rock dur et métal », il y a de quoi s’en mettre plein les oreilles et s’en briser gaiement la nuque de manière permanente. Les contrées du plat pays viennent régulièrement confirmer ce constat. Par contre, là où l’affaire devient plus complexe pour un groupe, c’est lorsqu’il s’agit de se démarquer de toute cette matière en se créant une singularité, une identité sonore propre. MY DILIGENCE en fait partie et leur quatrième album, tout frais et tout costaud, en est l’illustration parfaite, ayant bénéficié d’une production sonore aussi percutante que maîtrisée. Le groupe bruxellois actuellement en tournée commune avec DVNE est venu présenter ces nouveaux titres du coté de l’Orangerie du Botanique ce mardi soir. Inutile de préciser que les murs ont tremblés.

Double affiche donc, et ce sont les Écossais de DVNE qui sont les premiers à faire cracher les décibels des guitares dans les enceintes d’une Orangerie déjà bien remplie. Ils empruntent au post-rock l’idée des tableaux musicaux, le plus souvent tempêtueux, en y ajoutant une couche de chant aussi aérien que guttural, selon les moments. Les guitares et leurs riffs sont en effet plus proches du métal que du rock qualifié de traditionnel. C’est ainsi que chaque titre s’étire dans le temps avec ce petit quelque chose d’hypnotique qui ne lasse pas et qui nous maintient en haleine tout au long de leur set. Avec une petite heure au chronomètre, cela leur laisse en effet le temps d’amener et de construire un univers sonore live. Les amateurs de classification musicale n’en finiront pas de se perdre en adjectifs et termes descriptifs divers pour tenter de cataloguer le groupe quelque part entre sludge, prog, post métal ou encore stoner. Il y a effectivement un petit peu de tout ça avec l’apport de synthétiseurs et de quelques arrangements sous formes de nappes sonores sombres. A vue d’œil, l’enthousiaste et attentif public, clairement orienté rock/métal, confirme ce brassage maitrisé et ordonné des sous-genre des musiques venues de tréfonds de la terre.

Le mec en charge de la playlist de la salle est par contre bien audacieux d’envoyer un titre coloré et psyché-festif d’Animal Collective entre les deux sets. Le genre de grand écart que nous apprécions cependant toujours. Cet intermède achevé, il est près de 21h30 lorsque MY DILLIGENCE prend possession de la scène. Ils ne sont « que » trois à monter sur scène. Et pourtant ils construisent un véritable mur sonore aux effets de rouleaux compresseur aussi puissant que mélodique. On ne s’étonne donc pas de les entendre citer Deftones et Gojira comme influences majeures de leur musique. Après un riff lancé de manière effrénée en intro, la masse sonore vient en effet nous percuter en pleine face pour une grosse heure, sans temps mort ou baisse de régime. Aussi, on constate rapidement que le chant occupe une place importante dans chaque morceau, au même niveau que les passages instrumentaux, entre passages plus posés et mélodiques et cris gutturaux, ou même certains passages aux airs de complaintes légèrement dramatiques qui sentent la new wave.

Le second titre de la soirée commence quant à lui avec un rythme assez lourd et lent pour ensuite partir en cataclysme électrique et abrasif, tout en maintenant un petit quelque chose d’aérien qui semble propulser l’ensemble sonore et scénique à de très hautes altitudes. Autre preuve de l’aboutissement de l’album et de sa transposition en live, le lightshow qui les accompagne n’est en rien minimaliste mais il n’est pas non plus surchargé. Les tableaux visuels sont plutôt de l’ordre des atmosphères vaporeuses aux airs de crépuscules rougeoyants ou d’aubes qui se lèvent sous haute tension. Enfin, quelques stroboscopes se chargent de venir faire comprendre à nos pupilles que la tempête sévit malgré tout pendant que la batterie se charge d’imprimer un implacable rythme à la soirée.

Le set avance, et par moment, on se dit qu’il y a chez eux ce petit quelque chose de complètement fou et hors de contrôle, aux allures de gros moteur V8 hurlant, lancée pied au plancher et sans freins sur les routes surchauffées des déserts américains, sous un ciel où se reflètent forcément les sulfureuses flammes des enfers. On pense à la fois à l’album « Songs For The Deaf » de Queens Of The Stone Age ou aux passages les plus costauds de la discographie d Alcest, en plus ténébreux. Et puis les passages plus légers, qui viennent précéder les explosions sonores et autres gros riffs bien gras et rugueux, nous font aussi penser à certaines constructions qu’on retrouve aussi chez Amenra. Il y a de la puissance, de la maitrise, de la nuance et une efficacité globale atomique qui ne laisse jamais place à la simplicité non plus. La fin du set arrive et My Diligence tue définitivement le game avec une dernière salve de guitares et de batterie qui a le mérite de faire doucement siffloter nos tympans lorsque les amplis finissent d’expulser un dernier larsen incisif. C’est en général le signal que la soirée a été plutôt réussie et ils sont en effet nombreux à se diriger ensuite vers le stand de merchandising à la sortie de la salle.

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