La fin des vacances (à défaut de parler de fin de l’été) pointe sérieusement le bout de son nez avec ce dernier week-end du mois d’août. C’est l’occasion pour nous d’encore un peu profiter de la saison des festivals en prenant la direction de la Province de Namur ce samedi pour le festival LES SOLIDARITES dont le duo BIGFLO & OLI occupe la très fédératrice tête d’affiche. Conséquence : plus une place à vendre depuis plusieurs semaines. Mais avant ça il y avait également d’autres concerts programmés en cette journée à la météo incertaine.

Au delà de son affiche, le festival Les Solidarités est marqué cette année par un déménagement de site qui a décontenancé pas mal de festivaliers : fini de grimper jusqu’au sommet de la Citadelle de Namur. Direction le site du Parc d’activité économique Ecolys au Nord de la ville. Nous voici donc embarqués pour un plongeon dans l’inconnu et la nouveauté puisque le site du festival a été complètement réagencé.

Présente à l’affiche du Pukkelpop le week-end passé, RORI est décidément de tous les festivals cet été. Elle ouvre, ce samedi, la programmation de la grande scène avec son look de grande sœur gentiment bordélique. Il est 15h et l’espace devant la scène est déjà bien remplit pour son set pop et rock où ses titres « Docteur » et « Ma place » finissent de convaincre les curieux et les indécis.

© Jérémie Piasecki

C’est ensuite SUZANE qui débarque sur cette même scène, un bon mois après son concert enflammé aux Francofolies de Spa. La plaine est comble pour accueillir la chanteuse venue du Sud de la France. La scène est vierge de tout artifice ou instrument, à l’exception d’un énoooooorme écran géant. Elle ouvre son set, vêtue de son short de boxeuse, sur le puissant « Génération désenchanté » avant d enchaîner sur le très dancefloor « Suzane » qui fait la plaine se soulever alors qu’elle envoie un gros beat bien gras depuis sa discrète console. Même registre pour « L’insatisfait », son premier titre composé. Place ensuite à son duo virtuel « Pendant 24h » avec Grand Corps Malade. Les titres s’enchainent et les sonorités transpirent aussi le soleil avec « Bella Donna ». Place ensuite au très dark « SLT » et son texte sans détour au sujet de la condition féminine sur fond de grosses basses brutales.

© Jérémie Piasecki

On continue la descente aux enfers dans les thématiques abordées avec « Il est où le SAV ? » qui traite du réchauffement climatique. Le titre « A la casa » fait cependant office de parenthèse illuminée. On ne compte plus les moments où Suzane va chercher le public qui se laisse embarquer par son énergie. Le set s’achève, avec Suzane au milieu de la foule, sur le furieux et gangsta « Danser ». La scène est son terrain et ce terrain est un ring sur lequel elle distribue les patates sonores et verbales tout en occupant l’espace avec conviction et vigueur. Il y a chez Suzane, tout comme chez Stromae, la même approche sonore dansante et festive, sur fond d’une vision du monde sévère et sans appel, sombre et presque dramatique. L’ovation qui suit en fin de set est longue et généreuse.

© Jérémie Piasecki

Nous prenons ensuite la direction de la scène de La Plage (la plus petite des deux scènes principales) pour le concert de CHILLA : entre soûl et hip-hop, elle ravit un public jeune alors que les familles prennent d’assaut les food-trucks, provoquant de gros embouteillages et de (trop) longues files dans les allées du festival. A côté de cela, comme chaque année, le festival accorde une place importante aux activités et animations pour les enfants, ainsi qu’aux associations aux finalités sociales diverses. On apprécie et on se laisse charmer longuement aussi par la scène ouverte où s’enchainent MCs pour des battles digne du film 8 Miles.

Retour à la grande scène pour le concert de 47TER où tous les bras s’élèvent vers le ciel dès le premier titre. À cheval entre rap, pop et rock, les 5 gaillards prennent d’assaut la scène avec aisance. Ils sont trois à se partager le chant, appuyé par une batterie, des synthes et des guitares. Chambrages, autodérision et autres rituels visant à chauffer un public de toute façon réceptif sont au programme. Les refrains sont repris en cœur par les plus jeunes, mais aussi par leurs parents. 47 Ter fédère tout en mettant une grosse ambiance. Pour ce groupe dont le premier opus est sorti en 2019, c est déjà le troisième album qu’ils sont venus défendre aux Solidarités. On apprécie tout particulièrement le moment où le groupe fait appel à un piano-souffleur pour donner une couleur reggae-dub au set. Du Reggae-dub mais cela n’a rien de tranquille. C’est même plutôt énervé, avant de partir en gros pogo dans les premiers rangs sur le titre suivant. Le set s’achève dans un final disco bien musclé suivi d’une ballade nostalgique.

© Jérémie Piasecki

Retour vers la « petite scène » pour le set de LUJIPEKA où se trouve un grand pot de sauces hot and spicy ainsi qu’un milkshake aux couleurs criardes. On aperçoit aussi une batterie et une table de mixage. Il envoie son titre « Putain d’époque » d’entrée de jeu. La suite du set est dans le même registre, entre hip-hop et chant, avec la traditionnelle dose d’autotune, sans excès cependant. Lujipeka est pas mal appuyé par son DJ qui l’accompagne régulièrement au chant et sur les refrains les plus costauds. En cours de set, arrive un titre qui sonne comme le Doc Gyneco de la grande époque. Un délice. Bref, c’est un set varié que Lujipeka propose alors que la nuit tombe, tout comme le thermomètre qui chute de manière vertigineuse.

© Jean-Yves Damien

Il faut jouer des coudes pour trouver une place devant la grande scène, et ce près d’une heure avant le début du concert de BIGFLO & OLI. Dire qu’ils sont attendus est un euphémisme. Il est 21h40 lorsqu’apparait le visage de l’humoriste David Castello-Lopes sur les écrans. Dans une courte introduction, il nous annonce le début du concert des deux frères toulousains, prenant bien soin de notifier qu’ils ont chanté autre chose que « Dommage ». Ce sont ensuite de nombreux musiciens qui montent sur scène, parmi lesquels on retrouve des cuivres, des beatmakers et un très classieux violoncelle. Ils se lancent dans un titre où instruments classiques et sonorités électroniques se mélangent. Les deux frères apparaissent ensuite en fond de scène et entame pour de bon le concert avec « La vie d’après » et ses 7 minutes aux airs de coup d’œil dans le rétroviseur. Le flow est vif et percutant, jamais agressif. L’habillage musical est travaillé. On apprécie tout particulièrement la présence et la mise en valeur du violoncelle. Dans le public, ça chante toutes les paroles. Les titres de Bigflo & Oli ont visiblement tourné en boucle chez un bon paquet de familles.

© Stephane Risack

L’énergie qui se dégage de la scène vient de partout : les deux frères arpentant la scène dans tous les sens, quand ils ne poussent pas le souffle dans une trompette ou qu’ils ne vont pas frapper du fut et de la cymbale derrière la batterie. Les autres musiciens sont aussi aussi dans un constant mouvement, en rythme avec les titres. Et puis il y a cet écran géant et ses projections à l’esthétique parfois très léchée comme sur le titre « Sur la lune » ou carrément hilarant sur « Coup de vieux » qui nous replonge en plein cœur des années 2000. Le concert et les projections prennent ensuite des airs de Street Fighters sur le faussement badboy « Booba » avec son jouissif refrain repris une fois de plus en cœur par les festivaliers. Fumigènes et flammes sont aussi de la partie de temps à autre pour compléter un show de haut vol où personne ne s’ennuie jamais et où rien n’est jamais excessif. On voit également débarquer sur scènele beatboxer WAWAD pour une battle avec Flo à la batterie, avant que cela ne prenne une tournure drum’n’bass tout en revisitant quelques classiques de la musique électronique.

© Stephane Risack

Bien évidemment « Dommage » et son intro en piano-voix transforment la plaine en karaoké géant. Cela tombe bien, les paroles apparaissent sur l’écran géant. La fin du concert arrive avec « Dernière » et sa mélodie festive. Bigflo & Oli sont alors rejoints par 47 Ter pour un final en forme de feu d’artifice. On le savait déjà, mais le concert de ce soir confirme que Bigflo & Oli font se rassembler, autour du rap, des parents et leurs enfants, jeunes ou adolescents, venant tous ensemble au concert.

Le concert fini, on assiste alors à une énorme transhumance en direction de la sortie du festival. Les autres festivaliers prenant la direction de la petite scène pour le concert de KID FRANCESCOLI. Le producteur français et ses deux musiciens déversent leur électro-disco élégante et sensuelle à la fois, dans la nuit namuroise. Tout ça se deroule sur un fond de scène scintillant, bercée par la voix de la bassiste. Il est minuit trente passé lorsque le trio présent clôture le voyage sonore de la journée avec le très à propos « Moon » et son entêtante mélodie qui réchauffe les festivaliers.

© Jean-Yves Damien

Concernant le nouveau site : les amoureux de la Citadelle sont forcement déçus : on a gagné en béton mais il y a aussi beaucoup de zones couvertures de gazon. On a par contre perdu les graviers et la poussière de l’esplanade de la grande scène mais aussi le cadre magique du théâtre de verdure. Le nouveau site est plus impersonnel mais relativement fonctionnel sans non plus être austère. La configuration des espaces crée quelques entonnoirs qui rendent la circulation sur le site par moment délicate, surtout une fois que la nuit est tombée et que la foule se déplace entre les concerts. Pareil devant la grande scène à l’heure de pointe, où la visibilité n’est pas top non plus au delà de la régie du son. A l’année prochaine pour transformer un essai où auront été corrigés les inévitables bugs liés à une nouvelle implantation ?

© Jean-Yves Damien
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