La Belgique est un pays de paradoxes et de phénomènes tous plus surréalistes les uns que les autres. C’est notamment le cas dans le domaine de la musique avec des groupes dont le succès et la notoriété d’un côté de la frontière linguistique se transforme en black-out total une fois passé de l’autre côté de cette même frontière. Le groupe néerlandais de KENSINGTON en est l’exemple type. Vous n’en n’avez jamais entendu parler ? C’est bien dommage car ils chantent pourtant en anglais dans un style qui évolue quelque part entre Kings Of Leon et Fall Out Boy et Mumford & Sons. Ils étaient de passage ce vendredi soir à la Lotto Arena. On s’est donc engouffré dans les embouteillages du Ring d’Anvers pour aller découvrir tout ça en live et, on l’espère, vous donner l’envie d’aller jeter une oreille (et même les deux) à leur discographie.

Le power trio de RAMKOT œuvre les hostilités avec un rock bien balaise ou la guitare et la basse crachent nerveusement les décibels alors que le batteur frappent énergiquement ses fûts et cymbales. Tour ça prend des airs à la Royal Blood : du gros son bien énergique à écouter avec une bonne bière à la main. Le Nord du pays, bien qu’ regorge de groupe de cette veine musclée et énergique. Écoutez Studio Brussel pendant une journée et vous en aurez la preuve. C’est donc ensuite le quatuor néerlandais qui part à l’assaut de la scène de la Lotto Arena. “Partir a l’assaut” est bien l’expression appropriée puisque les premiers accords de guitares qui retentissent dans la salle transpirent l’énergie et les mélodies accrocheuses. Casper Starreveld, le chanteur-guitariste se pointe sur scène avec une casquette vissée sur le crâne et une sorte de grand et large pull à capuche couvrant également sa tête dans un style emo-punk, le maquillage en moins (ou alors on ne l’a pas vu d’où nous étions). Le reste du groupe est composé du traditionnel trio guitare-basse-batterie accompagnés de quelques synthétiseurs et d’un piano.  Le début du concert est mené pied au plancher dans une démonstration de force et d’efficacité musicale et scénique dont on avait perdu l’habitude avec le Covid. Le groupe a mis les moyens pour proposer un véritable show sonore (la puissance et le volume sont bien présents) et visuel qui envoie du lourd avec tout l’attirail habituel qu’on retrouve dans ce genre de concerts : canons a confettis et serpentins, flammes et autres effets pyrotechniques toujours surprenant lorsqu’un concert se déroule en intérieur. Heureusement, le jeu de scène du groupe ne devient pas dépendant de ces effets. Au niveau du son, on est donc bien dans un registre rock anglo-saxon savamment équilibré pour passer l’épreuve du feu auprès d’un public plus large, plus branché sur les ondes radios traditionnelles. L’apport des synthés et de couplets souvent plus posé (on pense alors aux derniers albums de Mumford And Sons) y sont pour beaucoup. Car souvent quand les refrains rugissent, c’est sous la forme d’hymnes taillés efficacement pour être repris par les foules .La première partie du set est dans cette dynamique avec notamment le premier titre qui ouvre le concert, « Bridge ». Pas mal de tubes en puissance ou tout du moins de bon gros brûlots pop-rock. Le titre « Bats » prend des airs et des rythmes qui nous évoquent le break monstrueux du titre « The Don’t Car About Us » de Michael Jackson. La voix du chanteur est équilibrée entre ce qui peut s’apparenter à un chant écorché mais finalement plus puissant et énergique que plaintif. D’où l’impression générale d’énergie empreinte d’émotion qui se dégage de sa voix et de la musique. En bon francophones que nous sommes, nous sommes à chaque fois un peu bousculé lorsque le groupe s’adresse au public en néerlandais avec cet accent abrasif que seuls les Oranjes semblent pouvoir maitriser… et comprendre. Le groupe voyage aisément au travers de sa discographie riche de 5 albums, dont le premier remonte à 2011 et le dernier, « Time », de 2019. Ce concert s’inscrit aussi dans le cadre de la tournée qui encadre cet album qui est donc malgré tout mis en avant ce soir mais sans occulter la densité des autres titres du groupe. Le milieu du set se veut ainsi plus posé, avec notamment le titre « Sorry » joué en piano-voix. Certaines mauvaises langues parleront du « quart d’heure des mijoles ». Le très beau « Uncharted » est du même style avec une belle mélodie qui aurait pu servir de bande-son pour la scène d’happy ending et de réconciliation d’un film romantique. Mais tout ça n’a rien de cucul ! La partie principale du set s’achève avec le très abrasif et nerveux « Perfect Family Day » qui prend des airs de rock and blues un peu progessif joué dans une pénombre rougeâtre. La fin du morceau est une longue montée en pression des guitares avant d’aller défoncer les enceintes pour de bon. Tout ça sous un lightshow tournoyant. Le rappel est l’occasion (un peu prévisible) pour le groupe d’envoyer toute sa machine à hit et de faire hurler en cœur toute la salle sur chaque refrain de titre comme « Do I Ever », « Home Again » ou l’énorme « War » dont le riff de guitare astronomique ne peut que vous faire tourner la tête dès la première écoute. Et c’est finalement ce titre emblématique du groupe qui résume un peu à lui tout seul ce qui fait l’identité de ce groupe : des titres puissants, accessibles et rapidement identifiables dans des sonorités à la portée internationale, tout en prenant soin que l’instru ne soit jamais trop consensuel et adouci. Et si on ne vous le dit pas, rien ne vous permettra de savoir que ces 4 garçons sont origines des Pays-Bas, ils pourraient très bien venir d’Angleterre ou des États-Unis. On vous avoue ne pas trop comprendre la confidentialité de leur succès en Belgique francophone alors qu’ils remplissent les salles au Nord du Pays, aux Pays-Bas bien évidemment, et dans pas mal d’autres pays européens. Bref, il n’est pas encore trop tard pour se pencher sur le sujet « Kensington ».

SETLIST – Kensington – Lotto Arena Anvers – 05/11/2021

Part of Me – Riddles – Bridges – Bats – Regret – Words You Don’t Know – Island – All Before You – Insane – Control – Sorry – Uncharted – Chronos Pt. 1 – Chronos Pt. 2 – Perfect Family Day – Little Light – All for Nothing – Do I Ever – Home Again – War – Streets – St. Helena

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