« Mickey, Mickey, Mickey! » Non en ce week-end festif à Soignies, ce n’est pas à une ribambelle d’enfants pressés qu’on leur allume la télé sur la chaîne de Disney que nous faisons face mais bien à un retour au sommet d’un des groupes les plus emblématiques des années 2000: Mickey 3D. Revenu en puissance et en beauté avec Sebolavy après sept ans d’absence, le groupe emmené par Mickaël Furnon (entouré de Najah El Mahmoud, Sylvain Gras, Fabrice Treve et Guillaume Poty) a une nouvelle fois prouvé qu’il n’a pas son pareil pour parler des choses de la vie, des filles et des roses (en prenant soin d’évacuer toute leur eau susceptible de parasiter le propos).
Des Nuits Botaniques de Bruxelles à Soignies, il n’y a qu’un pas, au pire quelques kilomètres, quand on aime la musique. Et il y a des moments qu’on ne pourrait manquer. La venue de Mickey 3D après tant d’années d’absence en est assurément un. Et c’est peu dire qu’il a trouvé un bel écrin dans le centre culturel Victor Jara en collaboration avec le Centre Culturel de Braine-le-Comte. Et le public, constitué de fans de toutes les heures, s’est passé le mot: il y a du monde dans la salle passée en configuration debout (il faut bien ça!). Mais avant toute chose, encore un peu de patience, et c’est sous le ciel musical d’un jeune artiste que la première partie nous entraîne: Anwar.
Anwar, il a le soleil dans la peau et il n’a pas son pareil pour nous faire voyager au son et à la chaleur de sa guitare, aidé aussi par son compagnon de route, Javier Breton. Entre pop, soul et reggae, le Bruxellois se débrouille plutôt bien, n’hésitant pas une seconde à rendre un hommage de classe à Bobby McFetrin. Si le temps se gâte dehors, il n’y a pas d’inquiétude à avoir, Don’t Worry, be happy. Sans commune mesure avec le concert qui suit, Anwar réussit à pourtant emballer le public qui, timide, au début, se prend au jeu et met déjà une ambiance de folie, nourrissant les applaudissements pour Anwar.
Le temps de la rencontre est passé, place maintenant à un sacré monstre du rock depuis vingt ans et que tout le monde connaît bien. Dehors, c’est quasi l’orage mais, ici, c’est Mickey, petite souris noyée (mais pas vaincue, que du contraire) dans une modernité peu réjouissante, qui balance les éclairs. Avec un sens tout personnel et toujours très inspiré du texte. Le groupe stéphanois (comme Lavilliers!) ne s’est pas assagi et assène Après le grand canyon, invoquant Géronimo dans une suite directe de Respire.
La première partie du concert fera la part belle au nouvel album (qui résonne un peu comme un état des lieux de la quarantaine) avec l’entraînant En léger différé puis l’excellent Sebolavy (« Après les prochaines élections, faudra peut-être s’enfuir en avion« ), ou encore J’attends Mylène, variation faussement enfantine sur le thème brûlant de désir de l’infidélité. Après Mylène, voilà Sylvie (et l’insouciance des jeunes années), puis la Grand-mère, Mickey rend hommage à ses Minnie et ça lui va plutôt bien. C’est touchant. Comme La Rose Blanche, fleur au bout du fusil, pour évoquer le mouvement de résistance au nazisme mené par des étudiants allemands exécutés en février 1943. Mickaël Furnon a ce sens incroyable de la poésie et des images (« Les idiots ne l’emportent jamais, mais le ciel a tout filmé« ) pour percuter les émotions et nous embarquer. Quelle réussite.
« Fumer de la Jupiler »
On laisse les nouvelles chansons pour parcourir le passé par petits bonds de bonheurs. Tu m’étonnes, non Ça ne m’étonne pas. Et même si on est samedi, on retrouve la fièvre du Jeudi Pop Pop. Le public est ravi et de plus en plus galvanisé. Au détour des Gens raisonnables, Mickaël s’amuse: « C’est facile à danse, vous pouvez fumer de l’herbe. Ou fumer de la Jupiler« . Manifestement, il connaît son belge public! L’accordéon nous entraîne de plus belle dans une danse. Avant de redécouvrir le parfait Personne n’est parfait que personne dans la salle ne se prive d’entonner. Trois lascars bien chauds s’installent devant nous pour quelques pogos. Ça en amuse certains, d’autres sont désabusés. Comme quoi, Mickey 3D est multiculturel mais règne en Matador et défie le monde. Quitte à tout prendre, puisqu’il ne restera rien, Plus rien. Et le rock se fait dur, pour cogner fort. Jusqu’au lancinant et fiévreux Il faut toujours viser la tête!
On se dégage, on retrouve ses esprits, on Respire, et la chanson qui a fait connaître Mickey 3 à un plus grand nombre résonne (si seulement elle avait pu raisonner aussi), treize ans plus tard. Le concert touche lentement à sa fin, et le groupe nous fait un cadeau, de derrière les fagots, une accalmie. Jamais avant cette tournée, il n’avait repris le formidable Les Lumières dans les plaines. C’est désormais chose faite, et ça donne quelques frissons. Les lumières s’éteignent et l’assistance ne se prive pas de rappeler le chanteur et sa bande: « Mickey, Mickey, Mickey…«
Le chanteur ne se fait pas apprendre, et reprend seul à la guitare une des chansons « brassens-iennes » et piquantes du dernier album évoquant François… sous la pluie, une valse sans gratuité et encore terriblement bien écrite. Pour conclure son tour de chant, Mickey 3D invoque Souchon et son plus que jamais actuel C’est déjà ça. Mais définitivement, on ne pouvait pas en rester là, on regagne la légèreté comme on fond sur un but avec Johnny Rep. La bière coule presque à flot, c’est la fiesta. Mickey 3D a marqué un but cinq étoiles en venant à Soignies. Les idiots ne l’emportent jamais mais Mickey a tout emporté!