Alex Beaupain est un homme orchestre. Il écrit et compose pour lui (« Loin », son dernier album est un bijou), pour son fidèle comparse Christophe Honoré (« Les Malheurs de Sophie » sorti cette semaine au cinéma), pour ceux qui ont la bonne idée de faire appel à son élégance (Julien Clerc), pour accompagner l’aventure de l’écrivaine Isabelle Monin (« Les gens dans l’enveloppe »).
Donnant l’impression d’une apparente fragilité, Alex Beaupain va bien au-delà.

Les Nuits Botanique avaient eu l’excellente idée de le programmer sur la scène du Cirque royal. L’espace, dont le plafond s’était drapé d’un magnifique tissu rouge, s’est révélé l’écrin idéal pour ces 50 minutes suspendues dans le temps.

Quand l’homme, tout de noir vêtu, entouré de ses musiciens, foule la scène l’atmosphère est partagée ; on palpe l’impatience des amoureux de l’artiste qui attendaient son retour depuis trop longtemps et la curiosité naissante de ceux venus pour la tête d’affiche de cette soirée (Katerine). Dès le premier sourire en coin, on sait que le français, pourtant malade, est de retour et va dérouler toute la subtilité de son répertoire.

Attaquant au piano avec «Couper les virages», Alex Beaupain emmène les spectateurs dans un road movie à plusieurs lectures.

Et c’est dans cette arrogante confusion des émotions qu’il n’aura de cesse de balader le public au fil de titres choisis avec une impeccable cohérence et un parti-pris assumé.

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Bien entendu, on sait le répertoire de l’artiste profondément ancré dans un subtil mélange de mélancolie et de douleur sur fond de deuil mais les arrangements musicaux apportent cette fois une dimension beaucoup plus urgente et immédiate au sens des mots.

Comme un alchimiste, Alex Beaupain dose les ingrédients jusqu’à ce que la poudre d’or surgisse. L’émotion, la force, la fragilité mais aussi l’humour et l’autodérision. Car l’homme, sous des aspects d’une élégante distance, se révèle très communicatif et capable de plaisanteries fines entre les morceaux. Dédramatiser les mots forts et parfois durs de ses chansons. Laisser le public respirer, lui rappeler peut-être que la gravité n’existe pas sans légèreté, que la plus profonde introspection ne se révèle que lorsqu’elle est mise en miroir avec la lumière des instants de partage. Reprendre son souffle.

Ce samedi, le Cirque royal s’est soumis, sans résistance, à la vague Beaupain, ce roulis de larmes et de sourires naissants. L’émotion était belle, la lumière aussi.

Crédit Photo: Shirley Hicter
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