Alors que Radiohead vient d’entamer une très médiatique série de concerts dans plusieurs villes d’Europe, JADU HEART, autre groupe anglais (un duo précisément), était de passage à l’Orangerie du Botanique ce jeudi dans le cadre de la tournée qui accompagne « Post Heaven », leur 4° album sorti cette année. Pourquoi comparer d’entrée de jeux ces deux groupes dont les notoriétés respectives semblent se situer à des extrêmes diamétralement opposées ? Notre réflexion est la suivante : les deux formations semblent partager un ADN musical et artistique relativement commun. Fondé au milieu des années 2010, Jadu Heart pourrait être un des nombreux descendants directs de Radiohead. Mais il peut être difficile de se faire une place et un nom lorsque l’on cohabite avec un géant. Il est donc temps de rendre justice à Jadu Heart en les faisant sortir de l’ombre pour de bon.

En arrivant dans l’Orangerie, on constate que c’est en version « réduite » que la salle à été configurée ce soir. Réduite mais avec un public (très anglophone) malgré tout présent en nombre et bien au courant de la discographie du groupe. Sur scène on retrouve, en plus des instruments rock habituels, quelques discrets mais bien présents synthétiseurs et autres machines électroniques et digitales. Le duo initial passe ainsi à 4 membres sur scène. Le début du concert prend forme autour de boucles électroniques remplies de beats complexes et hypnotiques. La voix de Diva Jeffrey (chant, basse et synthés) vient ensuite se poser en douceur avant qu’une guitare bourdonnante et grésillante fasse son apparition et que la voix Alex Headford (chant, guitare et beatmaker) ne prenne le relais, entre nervosité et sensualité. Au cours de ce premier titre, on voit également apparaître un surprenant violon qui accompagne un ensemble devenu très rock, la batterie tabassant ouvertement depuis le fond de la scène.


L’ensemble est visuellement servi par un lightshow quant à lui enfumé et jaunâtre, rappelant par moment l’ambiance du clip de « Creep » de… Radiohead. Le concert s’inscrit dans une dynamique plutôt groovy et presque dansante alors que la voix légèrement cassée Diva Jeffrey sonne de manière plutôt agréable dans notre oreille. Elle s’en excuse d’ailleurs mais en ce qui nous concerne cela nous convient très bien. Dans une dynamique DIY, Jadu Heart expérimente, bidouille et sur scène chacun se place dans une optique multi-tâches : Alex Headford délaisse ainsi sa guitare pour la prêter au batteur pendant qu’il s’affaire sur son PC portable le temps de quelques ondes sonores plus trip-hop. Ce même batteur deviendra un peu plus tard également claviériste et lui aussi beatmaker. On note aussi l’importance vitale de la basse dans le set, créant à elle seule le battement et les reliefs de chaque titre.

Arrive ensuite un titre emmené par un sample électro très british et nineties tandis que le chant se fait plaintif, lancinant et habité tout en restant très lumineux. Que celui qui vient de penser à Radiohead se dénonce ! Le titre se fait ensuite beaucoup plus viril et nerveux. Cependant, Jadu Heart évolue dans une énergie bien moins obscure et introspectivement tourmentée que ses aînés. Jadu Heart est parfois, osons l’expression, presque festif. La fin du set arrive avec un titre très électronique où des boucles digitales syncopées sont contrebalancées par le chant légèrement autotuné de Diva Jeffrey tandis que de grosses vagues de basses font ondulés le public du Botanique. On s’en va titiller les univers sonores perchés dont Animal Collective en a fait sa marque de fabrique. L’affaire s’achève en version full électronique et sous les tempêtes de strobosocopes. Idéal pour achever la partie principale du set et laissé ensuite place au rappel avec la quasi-berceuse « Walk The Line ».



A notre humble échelle, nous rendons donc justice à Jadu Heart en mettant en lumière la richesse, la qualité et la diversifié de leur discographie trop méconnue alors qu’ils excellent dans le registre de l’indie-pop alternative électrifiée et hybride sans jamais basculer dans un truc expérimentale complètement barré et inaccessible au commun des mortels. Le duo partage avec Radiohead un goût de l’expérimentation musicale et sonore (guitares bidoulliées, voix réverbées) à l’écart des conventions musicales mainstreams sans pour autant en rejeter certains aspects, proposant quelque chose de singulier et chaleureux à la fois. L’ambiance de ce jeudi soir au Botanique en était la plus belle démonstration, entre enthousiasme et décontraction sans prise de (grosse) tête.

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