C’est en tout début de cette soirée du vendredi que nous avons grimpé les marches nous menant au Club de l’Ancienne Belgique. En tout début de soirée car le menu du jour est copieux avec pas moins de trois groupes au programme : les Anglais d’Oversize, les Américains de Keep et enfin les Louvanistes de Slow Crush en tête d’affiche. Ces trois formations évoluent dans les oniriques mais tumultueuses contrées du shoegaze et d’autres courants rocks alternatifs où se mêlent murs de guitare et mélodies souples et aériennes. C’est donc un échantillon en partie représentatif d’une scène bouillonnante qui sévit des deux cotés de l’Océan Atlantique qui nous est proposé, avec un certain succès puisque la soirée affiche complet depuis quelques semaines déjà.

Et c’est d’abord de l’autre côté de La Manche que les choses démarrent sur le coup de 19h15 avec OVERSIZE. Au milieu des 4 musiciens plutôt visuellement typés rock-métal, le chanteur dénote quelque peu avec sa moustache, sa casquette, ses lunettes et son t-shirt blanc rentré dans son pantalon. Durant une demi-heure, le groupe déverse des riffs lourds et saturés sur fond d’un chant lancinant et mélodique ponctué de quelques cris gutturaux. Ces jeunes gens ont probablement écoutés les albums de Deftones en boucle avant de se décider eux aussi à brancher les amplis. On apprécie l’alternance de passages plus épurés avec les moments où les guitares, la basse et la batterie remplissent à l’excès l’espace sonore du Club. Voilà donc une première bonne découverte pour ce soir.

On continue ensuite notre traversée de l’Atlantique en mettant le cap sur l’Ouest avec les Américains de KEEP qui montent sur scène. C’est dans une brume de fumigène bleutée que le groupe entame son set. Chose plutôt rare, mais loin d’être inédite, la partie chant est assurée par le batteur. Quelques effets d’échos rendent sa voix lointaine, résonnant dans une impression d’espace infini. Avec Keep, on bascule dans une musique toujours aussi électrique et saturée mais avec quelque chose de plus contemplatif, de moins orageux qu’avec Oversize. Le tout restant malgré tout sauvagement indompté. Un peu comme la nature en somme : on la comprend, on pense l’avoir saisie et donc maîtrisée avant qu’elle ne finisse toujours par nous rappeler son implacable imprévisibilité. En définitive, Keep propose un set immersif à un public nombreux, attentif et réceptif à la construction des atmosphères et des tableaux sonores que chaque titre impose.

Il est ensuite l’heure de passer au menu principal du jour avec les très attendus SLOW CRUSH. À force de tourner un peu partout dans le monde (notamment aux Etats-Unis), leurs concerts sur le territoire belge se font plutôt rares. C’est donc avec enthousiasme que le public de l’AB se laisse submerger par la massive et bourdonnante introduction du concert. Et c’est avec le vif « Thirst », qui donne également son titre au dernier album sorti cette année que les 3 musiciens et leur chanteuse-bassiste aux jambes couvertes de tatouages entament leur set. Les vagues électriques envoyées par le groupe sont contrastées par la douceur de la voix qui réussit à émerger de cette musique très chargée.

Avec d’impressionnantes tables de pédales d’effets posés au sol devant chaque musicien, le son de Slow Crush évolue sans cesse tout au long du concert, proposant parfois des guitares claires, lentes ou syncopées, qui ne font que mieux préparer le terrain pour d’autres accords plus costauds, ponçant le plancher alors que la basse se charge de fissurer les murs. Le mixage sonore étant également bien foutu, nous avons la possibilité de pouvoir identifier assez aisément les différentes couches sonores que le groupe construit sur chaque titre.

Le set étant construit comme une sorte de voyage en contrée inconnue où règnent aussi bien l’obscurité qu’une sorte de douce féerie, l’atmosphère se fait ensuite plus aérienne et contemplative après un premier bloc assez massif. Les guitares se font alors elles aussi plus douces, la batterie plus discrète, permettant alors à la voix aux accents angéliques et oniriques d’occuper l’espace. Ces instants de plénitude rendent les assauts sonores suivants d’autant plus puissants, laissant à nouveau la place à de grosses tempêtes de riffs et à une batterie qui bastonne alors sur un cardio bien élevé. Le groupe ne reste d’ailleurs pas sagement concentré devant ses amplis et ses pédales d’effets, le jeu de scène est dynamique et chaque musicien doit faire attention à ne pas donner un coup de manche de guitare ou de basse à son voisin. Dès lors, tout au long du set on retrouve chez Slow Crush une agréable énergie juvénile, presque adolescente et héritée de l’époque dorée du rock de la fin des années 90 et du début des années 2000, notamment en provenance des contrées US.

La fin du set se dessine au bout d’une grosse heure lorsque le groupe entame le titre « Glow », issu de leur premier album, « Aurora », sorti en 2018. Ce titre offre aux spectateurs une dernière grande cavalcade électrique qui s’achève dans une long outro féérique qui laisse planer le doute quant à un éventuel rappel. Il n’en sera rien et la transition sera plutôt atypique lorsqu’en rallumant les lumières de la salle, le petit malin qui gère la playlist balance le très kitsch « Vamos a la playa » dans les enceintes. Les membres du groupe ont profité de ces quelques minutes de doute pour se rendre au stand merchandising et ainsi pouvoir être disponible pour les fans de manière immédiate. Plutôt sympa.

En parlant de stand merchandising, il nous reste une dernière chose à rajouter au sujet de cette soirée : aucun concert n’étant programmé simultanément dans la grande salle ce vendredi soir, le merchandising des trois groupes était exposé dans le grand hall d’entrée de l’AB, donnant des airs de galerie marchande ou de convention pour les amateurs de musique. Un coin de paradis sur Terre en quelques sortes. Il n’était donc pas nécessaire de jouer des coudes dans l’exiguïté du Club et il était dès lors possible de discuter tranquillement avec les membres des différents groupes du jour, cerise sur le gâteau d’une belle soirée ayant rassemblé autour d’une même idée de la musique des groupes basés de chaque coté (et un peu au milieu aussi) de l’Atlantique.

SETLIST – Slow Crush – Ancienne Belgique – 31/10/2025

Thirst – Covet – Leap – Drift – Tremble – Aurora – Bloodmoon – Haven – Hlytt – Cherry – Glow

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