Après un premier EP sorti en 2022 et déjà salué par la critique, le duo composé de Francois Custers et Pierre Van Vlaenderen (Endless Dive) est de retour pour un deuxième acte avec 7 nouveaux titres rassemblés sous le nom de “State Of Denialism”. GUILT se positionne à la croisée d’influences pop alternative et électro aux couleurs sombres mais sophistiquées. Pour être certain que le tableau reste bien dans l’obscurité, ce second EP s’articule autour de la capacité que nous avons à nier les catastrophes de notre époque. Cette sortie était cependant l’argument idéal pour les deux compères de s’offrir une release party dans une Rotonde du Botanique bien remplie en ce polaire jeudi 21 novembre.

En première partie, c’est le genre de producteur de sonorités qui sort des sentiers confortables et attendus de l’effort minimum que nous retrouvons. Comprenez par là que derrière le peusdo de ZON.E se cache un artisan du son qui, armé de sa batterie, d’un PC et de synthés, propose une musique live aussi synthétique qu’humaine. Il y a chez lui un peu de trip-hop et de jazz-electro où s’enlacent percussions et couches électroniques. Zon.e pourrait être rattaché à toute la mouvance emmenée par des groupes comme Tukan et Echt!. La mayonnaise prend et on se laisse entraîner avec légèreté dans cet univers à la cohérence musicale diversifiée et dansante. Pour ensuite patienter durant le changement de plateau, c’est l’album country de Beyonce qui est diffusé dans les enceintes. Pas trop dans le thème de la soirée mais pourquoi pas après tout.

En duo en studio, c’est en trio que Guilt se mue pour le live avec le renfort de Martin Grégoire (Glass Museum) à la batterie. C’est avec une intro à base de nappes électroniques que le concert débute. L’ambiance sonore est sombre, légèrement oppressante, très cinématographique. Le travail et le traitement du son rapproche Guilt de certaines ambiances crépusculaires que l’on retrouve également chez Glauque. Le tout est supporté par un gros light show immersif qui absorbe la Rotonde. Au niveau de la voix de François, on pense à Oscar and The Wolf. Aux synthés et aux machines, Pierre gère son affaire avec doigté et pour construire les différentes couches et arrangements des morceaux. Quand à Grégoire, son jeu diversifié et sa maîtrise de la batterie n’ont plus à faire leurs preuves. Et ce n’est pas les petits soucis techniques rencontrés de temps à autre qui vont déstabiliser le trio.

Tant qu’il est question d’éléments perturbateurs, on en profite aussi pour pointer du doigt une partie du public (très minoritaire mais suffisamment nuisible malgré tout) qui confond les salles de concert avec le bruyant comptoir d’un bar où il forcément nécessaire de parler au moins aussi fort que la musique. Ce phénomène a malheureusement tendance à se répandre de plus en plus. Hors, pour les “vrais” amateurs de musique, ce que propose Guilt nécessite de pouvoir s’y plonger entièrement pour en saisir toute la finesse.  

François prend ensuite une guitare pour quelques titres plus vaporeux. Sa voix qui était jusque là lancinante se fait plus nerveuse, métallique et rocailleuse. Les ambiances sonores sont riches et complexes mais rudement efficaces pour faire hocher les têtes. L’impression de minimalisme qui peut parfois se dégager de la scène est pourtant le résultat d’une savante élaboration et construction mélodique et sonore, chaque chose ayant sa place, sans être superflue. Le set prend ensuite une tournure plus electro, aux influences cold wave avec quelques sonorités plus indus également. Le jeu et le son se musclent sans jamais tabasser pour autant ou céder à la facilité d’un boum boum basique et sans intérêt. Guilt nous embarque dans un intriguant et captivant voyage sur un dancefloor vallonné et sinueux où chaque virage est une découverte faite de sensations nouvelles, toujours avec ce lightshow qui sert la musique et la construction d’ambiances, et non les musiciens.

Guilt décide ensuite de nous faire découvrir une autre facette de son identité avec un titre plus aérien, presque suspendu. Là encore, une couleur vocale précieuse émerge des enceintes, François étant ensuite rejoint par un ancien réfugié pour un slam en arabe. Le set continue de nous faire découvrir les influences de Guilt avec un autre titre qui nous renvoie vers certaines productions des Liégeois de Roscoe, amorçant un passage instru plus post-rock, accompagné de synthés tournoyants.

En rappel, Guilt se lance dans un sombre et irrésistible titre dancefloor, digne d’un brûlot berlinois de Kompromat (Vitalic et Rebeka Warrior). Le dernier titre arrive ensuite dans une atmosphère solaire. Guilt est inclassable de par la richesse et la multitude de ces influences et de ces références, grisant les frontières sonores des genres tout en faisant preuve d’une solide cohérence d’ensemble et d’une accessibilité aisée. A découvrir et revoir en concert dès que possible.

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