LYLAC, Amaury Massion de son vrai nom, est un artiste belge très prolifique. Après des aventures aux sonorités au sein des groupes Attica et My Tv Is Dead, c’est en solo et derrière ce pseudo que le garçon a publié cet été son quatrième album déjà, dans un registre beaucoup plus folk. Avec “I’m The Stranger”, Lylac se positionne et se questionne sur l’avenir de la planète et sur la place que l’humain à y occuper. Scènes Belges a profité du fait que ce voyageur compulsif est, bien malgré lui, contraint à ne plus trop bouger pour l’instant pour aller discuter de tout ça avec lui. En plus il a sorti tout récemment un joli clip au titre très évocateur : “We need to change”, porteur d’espoir pour le futur mais dont l’humain sera l’acteur !
Scènes Belges : Bonjour Lylac. Peux-tu te présenter en quelques mots pour les lecteurs qui ne te connaissent pas ?
Lylac : Mon parcours musical a commencé assez jeune, vers 12 ans. Je suis rentré dans une chorale classique avec laquelle je suis parti faire une tournée d’un mois au Québec. Ça a joué pour mon amour de la scène déjà à ce moment là. Après, à l’adolescence j’ai commencé à monter des groupes avec des potes sans pour autant savoir jouer et lire de la musique. Mais j’ai finalement fait le conservatoire à Bruxelles et à Liège, en jazz notamment avec un tromboniste américain très réputé. C’était vraiment super instructif. Musicalement j’ai toujours été plus influencé par le rock et la folk. J’ai aussi eu deux groupes dans le passé : Attica et My Tv Is Dead. Ca c’est malheureusement arrêté. Et finalement c’est suite à long voyage, au Cambodge notamment, que j’ai décidé de lancer ce projet Lylac. C’est une sorte de carnet de voyage musical, avec notamment des sons enregistrés sur place qui se retrouvent dans mes compositions.
Scènes Belges : Ce projet a commencé en 2012 et ca a vraiment décollé avec le troisième album “Buffalo Spirit”.
Lylac : La presse a été positive concernant les deux premiers albums, il y a eu un succès d’estime. Mais avec “Buffalo Spirit” j’ai eu l’occasion d’être plus exposé. Cet album a été composé après un voyage exceptionnel de 3 mois et demi dans l’Ouest Américain. C’était extraordinairement beau et sauvage. On a fait des rencontres incroyables avec le peuple Navajos. Je fonctionne toujours de manière instinctive dans la musique et mes compositions. Il n’y a pas de plan établis au préalable. Je saisis l’instant, le lieu, les énergies. Je ne veux pas perdre l’émotion originelle de l’instantané. Et le public semble l’avoir reçu comme ça, avec cette impression de grands espaces qui en découle.
Scènes Belges : Le titre de ton dernier album, “I’m the Stranger”, sorti cette année est toujours lié à cette idée de voyage ?
Lylac : Oui il y a un peu de ça, mais pas que. J’ai été extrêmement touché par la mobilisation des jeunes pour le climat ces dernières mois. J’ai trouvé que c’était des moments incroyables. J’en parle pas mal dans mes textes sur ce dernier album, de la manière de réinventer le monde, de consommer ou de comment repenser la solidarité. Et la question que je pose c’est de savoir si l’humain est devenu un étranger par rapport à cette nature et par rapport à lui-même ? La pochette de l’album est dans le même état d’esprit avec ce lien entre l’humain et l’arbre qui le lie à la nature.
Scènes Belges : C’est donc un projet très personnel ?
Lylac : A la base c’est un projet solo effectivement, où je suis super bien accompagné par des musiciens. Mais c’est moi qui compose tout à la base. J’ai la grande chance que ces collaborations musicales perdurent. Je suis accompagné sur scène par une violoncelliste notamment. C’est une super équipe. C’est un projet solo où je suis très bien entouré. J’ai beaucoup de chance.
Scènes Belges : Comment pourrais-tu résumer les sujets et les thèmes abordés sur cet album ?
Lylac : Il y a différentes choses. Il y a une démarche assez liée à l’écologie c’est vrai, mais ça parle de voyage sous forme de retour à la terre et à nos racines. Dans “My Quest”, je parle de cette reconnexion avec la nature à travers l’amour que j’ai pour une femme, et le fait de se poser et vivre ensemble au même rythme que les rivières qui coulent. C’est assez poétique et métaphorique. J’ai écris le titre quand j’étais en Norvège au bord d’un fjord avec les montagnes qui s’élevaient dans une atmosphère de plénitude totale.
Scènes Belges : Pourquoi as-tu fais un remix du titre “My Bird” qui est un ancien titre et qu’on retrouve sur ce dernier album dans une nouvelle version donc ?
Lylac : Ce morceau j’avais envie d’en faire une nouvelle version. Je m’étais questionné sur l’opportunité de le retravailler avec un DJ. Mais comme le travail de la rythmique sur ce dernier album a été très différent de ce que j’avais fais dans le passé. C’était de la programmation, sans être électro, plus qu’un vrai travail avec un percussionniste. J’en ai alors profité pour retravailler ce morceau avec cette nouvelle “méthode” en allant puiser des sons existants un peu partout, comme pour tout le reste de cet album. Et je n’ai pas l’impression que le morceau a été dénaturé malgré ce beat qui rend le morceau un peu plus trippant je trouve.
Scènes Belges : Tu as donc tout composé et ensuite les musiciens sont venus poser leurs instruments ?
Lylac : Effectivement. Il y a une exception avec la violoncelliste. Il y a un vrai échange en forme de “ping-pong” entre elle et moi dans le travail de composition. On essaie des choses, elle fait des propositions, et moi aussi. On arrive au final à quelque chose qui nous plait tous les deux. Je fais beaucoup de choses c’est vrai, mais pas tout.
Scènes Belges : Tous ces voyages, c’est vraiment ça qui te nourris musicalement ?
Lylac : A travers ces 4 albums, je m’enrichis musicalement, par les rencontres et les atmosphères que je découvre. Le premier album était très sobre, sans artifice. A travers les voyages, une guitare acoustique et une voix étaient à la fois essentielles et suffisantes. L’émotion passe parce que la vibration du bois de la guitare et de la voix a quelque chose d’universel. Même au fin fond du Cambodge j’ai pu partager ma musique avec les populations locales, sans filtres, mêmes si on ne parlait pas la même langue. Les concerts avec plein d’artifices c’est bien aussi, mais revenir à quelque chose de très épuré c’est aussi important.
Scènes Belges : Et en dehors des voyages, je suppose que tu as des influences dans la musique que tu écoutes ?
Lylac : Oui, comme tout le monde j’écoute beaucoup de musique. J’écoute énormément de folk et de rock, notamment Eddie Vedder avec la bande originale du film “Into The Wild”. C’est clairement l’état d’esprit de Lylac. J’aime énormément de choses.
Scènes Belges : Et comment tu vis la situation actuelle en tant qu’artiste ?
Lylac : c’est compliqué, tout est constamment remis en question et susceptible d’être annulé, modifié, reporté, que ce soit pour la sortie de l’album ou pour les concerts. J’ai fais quelques concerts en live sur Internet mais ça n’est pas la même chose, on ne sent pas les vibrations et les réactions du public. C’est agréable, j’y ai pris du plaisir mais une fois fini, on coupe son PC et c’est terminé. Mais au niveau financier, c’est plus compliqué, voir catastrophique pour beaucoup de gens dans le secteur de la culture. C’est très inquiétant.
Scènes Belges : Dernière question, j’ai entendu parler que tu avais participé à un projet dans le cadre d’un opéra. C’est surprenant ! Tu peux nous en dire plus ?
Lylac : C’est un opéra qui s’est donné à La Monnaie. Le titre est “Is This The End ?”. C’est un opéra qui parle du moment entre la vie et la mort, le moment où on voit la lumière, où on ne sait pas si on bascule d’un coté ou de l’autre. C’est un honneur pour moi de pouvoir chanter avec un chœur de 20 personnes et un orchestre.
Pour rappel, son album “I’m The Stranger” est sorti au mois d’août en version digitale et physique. Après un nombre incalculable de reports, son concert au BOTANIQUE est (pour l’instant) programmé au 5 JUIN 2021 ! On croise les doigts.