Nous prenons ce jeudi soir la direction les caves du Botanique pour passer la soirée au sein de son Witloof Bar et de son atypique scène centrale callée entre 4 piliers de la salle voutée. Au menu, nous retrouvons le trio français un peu beaucoup barré de MEULE. On ne sait pas si ce nom fait référence à une quelconque supposition fromagère ou si il faut y voir des considérations plus techniques et mécaniques en provenance des rayons « outils de chantier » de chez Gamma ou Brico.
Avant ça, SLAMINO a pour mission d assurer la première partie. Nous vous avions déjà écrit tout le bien que nous pensons de ce garçon et son projet au début de cette année à l’occasion du concert qu’il avait donné dans cette même salle du Witloof Bar (notre article est à retrouver ici). Après une mise en bouche plutôt tranquille entre notes de guitares lumineuses et boucles électroniques apaisées, le rythme se fait ensuite plus soutenu, la guitare plus électrique et le lightshow se charge de faire tourner l’affaire à plein pot. On apprécie toujours autant ce côté artisanal, légèrement improvisé et sans filet où Slamino construit petit à petit les boucles sonores de chaque titre en les enregistrant directement sur scène grâce à une multitude de pédales d’effets. Malgré des sonorités électroniques assumée et bien contrebalancées par sa fidèle guitare. Le projet reste profondément vivant et humain. On rappelle que son premier album, « Fall Asleep », est un truc sympa à mettre sous le sapin dans sa version vinyle.

Place ensuite au trio de MEULE dont l’ensemble des instruments a été rassemblé et un peu tassé au centre la scène. Comme son nom ne l’indique pas, le trio est originaire de Tours. On aurait pu, par cliché et raccourci d’idée, penser que le groupe était originaire d’une contrée fromagère des Alpes. En attendant le début du concert, nombreux sont les spectateurs à tourner autour de cet ensemble d’instruments et de machines faussement foutraque, attiré avec curiosité par cette impressionnante table remplie de câbles et de boutons multicolores mais aussi par une gigantesque batterie qui permet à deux musiciens (une et un batteur en l’occurrence) de se faire face et de jouer sans risque de finir avec la baguette de son collègue dans l’œil. Rien que le dispositif valait le déplacement.

Sur fond de quelques voix vocodées, l’introduction du concert se construit à base d’ondes sonores probablement venues de l’espace et accomapgnées d’une bande vibratoire qui secoue sérieusement l’estomac. Des rythmes de batteries martiales se font entendre avant que l’air ne soit déchiré par un riff de guitare qui part aussitôt en larsen. Une boucle électronique entêtante fait elle aussi son apparition et nous voici embarqué pour un trip sonore d’une heure à la frontière de plein de choses, entre ce que la presse spécialisée nommait le krautrock au cœur des années 70, d’un style electro-rock et jazz dont des groupes comme Echt! et Tukan sont aujourd’hui les portes-drapeaux dans notre petit pays, et de ce quelque chose de nerveux et jubilatoire que le duo belge de La Jungle a très habillement baptisé le trance-rock. Ce premier titre nous emmène déjà au delà des 10 minutes avec un final surpuissant où la batterie voit sa force de frappe démultipliée tandis que la guitare n’est plus du tout là pour faire de la figuration, chaque riff s’arrachant violemment des enceintes. Alors que les voix n’étaient jusque là qu’une couche sonore parmi les autres, visant à compléter un habillage sonore déjà bien chargé, le titre « Entre deux » offre de véritables paroles avec couplets et refrains forcément entêtants. A cet instant, on pense aussi à certains titres un peu barrés de La Femme.
Visuellement et physiquement la performance du trio est impressionnante, avec autant d’énergie que de précision quasi-scientifique alors que tour semble finalement ne tenir que sur un mince et fragile fil haut perché, et là aussi sans filet. Sur la batterie, les deux métronomes sont parfois sur les mêmes rythmes et séquences et parfois leurs chemins s’éloignent sous forme d’oscillassions rythmiques pour ensuite mieux se retrouver, le plus souvent de manière explosive. Notre vue et notre ouïe sont généreusement servies Le jeune homme penché sur sa table de mixage, et qui de temps à autre envoie quelques grosses déflagrations avec sa guitare électrique, joue un rôle de chef d’orchestre, semblant veiller à la cohésion de l’ensemble. Tout ça est servi par un gros lightshow bien calé sur les rythmes et fréquences sonores que le groupe balance aux 4 coins du Witloof Bar qui remue un peu partout. Meule va ensuite sur un terrain où on ne les attendait pas en intégrant des boucles rappelant les heures dorées de l’acid-house, notamment popularisée du côté de chez nous par Emmanuel Top, avant de retourner vers des sonorités plus analogiques ou dans un registre proche du Space-rock.
Le concert touche à sa fin par l’intermédiaire d’un dernier titre tout aussi hypnotique qu’excitant. La démonstration aura été aussi efficace qu’excitante. Cela faisait longtemps que nous n’avions pas vu une prestation live aux allures de grand shaker dont émerge un cocktail aussi excitant qu’original et qui se compose d’influences multiples et parfois improbables. Et pourtant, tout cela n’a rien de bordélique ou de décousu et fait même preuve d’une cohérence explosive et dansante qui semble au final évidente.




