Le Botanique a cette chance de posséder une infrastructure permettant de proposer des concerts dans des configurations bien distinctes les unes des autres. Avec 4 salles dotées de caractéristiques architecturales distinctes et forgeant une identité propre à chacune d’entre elles, les spectateurs et les artistes ont l’embarras du choix. Ce mardi soir, c’est l’intime, immersive et circulaire Rotonde que nous avons investie pour une soirée shoegaze 100% US.
En première partie, nous retrouvons Soft Blue Shimmer, trio (quatuor sur scène) en provenance de Los Angeles. Avec son petit gabarit, la chanteuse-bassiste semble armée d’un instrument aux dimensions folles mais il n’en est rien, la taille de la basse est standard. Sa voix légère et douce, venant contrebalancer la fouge post adolescente de ce rock mélodieux, aussi lumineux qu’onirique et à l’énergie maîtrisée. Le groupe nous ramène à une époque où tout était facile et léger. Cependant, les deux derniers titres du set se font plus vénères et orageux, avec un beau lightshow qui vient compléter le tableau. Le public, connaisseur et attentif, profite de ce moment sans faire la navette en direction du bar. Ce dernier élément constitue en général un indicateur fiable quant au degré de satisfaction des spectateurs au sujet de la première partie.
Cold Gawd prend ensuite possession de La Rotonde. Derrière le nom de ce projet, se cache Matthew Wainwright, lui aussi Californien. C’est d’ailleurs en solo qu’il monte sur scène avec son bonnet orange et sa grosse doudoune (qui dévoilera ensuite un t-shirt « I love Brussels » probablement acheté à deux pas de la Grand-Place) pour un premier titre posé, tranquille et aérien, sur fond de nappes synthétiques épurées. Les trois autres membres du groupe le rejoignent ensuite pour donner le signal de départ d’un set où les guitares saturées et la batterie vont s’en donner à cœur joie. Et le signal de départ est du genre percutant avec un énorme cri rauque du bassiste. Durant une petite, heure, les enceintes du Botanique vont cracher des décibels où chaque nouveau riff va s’abattre comme une puissante rafale que seule la voix de Matthew Wainwright vient adoucir. Mais de temps à autre, le bassiste ponctue le set d’incursions vocales plus gutturales. Les amateurs d’atmosphères planantes et oniriques ont passé leur chemin depuis longtemps. Cold Gawd excelle en effet dans les ambiances mouvementées.
C’est dos courbés et avec les dreadlocks tournoyantes (toujours visuellement sympa) que chaque titre est interprété avec conviction pour construire ce shoegaze massif et puissant qui n’oublie pas de laisser de la place à la mélancolie et aux mélodies. Les riffs sont fougueux, nerveux et font balancer les têtes dans la fosse. Le ton général est donc plus rugueux que ce que peuvent proposer certains autres groupes issus de ce mouvement. Le public semble conquis par ces versions lives bien plus abrasives et musclées que leurs versions studios qui semblent presque aseptisées pour le coup. Le travail du batteur joue également un rôle important, ce dernier malmenant ses fûts et cymbales avec la précision d’un métronome qui finit par rendre chaque titre hypnotique. Tout ça se déroule dans une atmosphère lumineuse aussi tempêtueuse qu’étincelante malgré les rafales sonores grésillantes en provenance de la scène. C’est d’ailleurs avec un long et délicieux larsen bourdonnant que le groupe quitte la scène avant de revenir pour un dernier titre en rappel, tout aussi frontal que le reste du set. Il est 22 heures et Cold Gawd vient de convaincre plus que favorablement les nombreux curieux présents dans la salle ce soir.