Pour sa deuxième édition et durant trois jours, le festival bruxellois pose ses amplis dans trois lieux différents pour permettre à une petite quinzaine de groupes de diffuser généreusement leur lots de décibels dans un registre majoritairement rock et alternatif. A côté de la nouvelle salle du Club du Cirque Royal, le gros de l’activité scénique se concentre autour de la salle du Lac (à deux pas de la place Sainte-Catherine) mais aussi de La Vallée, sur l’autre rive du Canal à Molenbeek. C’est d’ailleurs entre ces deux salles moins connues du grand public que nous avons fait la navette ce samedi soir, le programme étant assez chargé. Nous avons dès lors été contraint de faire des choix et des sacrifices.

A côté des Commander Spoon, Echt! et autres Tukan, la scène belge qui marie électro, rock et jazz à de quoi se défendre. Et le trio ATHERIS vient compléter cette armada. C’est avec une batterie, des synthés et un saxophone qu’ils emmènent les festivaliers de La Vallée dans un univers sonore urbain et nocturne, avec d’agréable relents de trip-hop. Le saxophone y occupe une place dominante, les synthés et la batterie venant se greffer sur les notes qui s’enchaînent. On apprécie le souci du détail stylistique du saxophoniste avec son short de boxeur digne de Sylvester Stallone. Les morceaux prennent des airs de montagnes russes sonores et rythmiques où le batteur et le claviériste s’en donne à cœur joie.

Direction la salle du Lac pour la suite des hostilités avec un autre trio qui a commencé à sévir sur les scènes du pays depuis quelques mois maintenant. Emmené par sa chanteuse et bassiste, GOODBYE FORTUNE TELLERS apporte une nerveuse bouffée d’air frais à un garage rock aux mélodies efficaces et incisives, entre sensualité et froideur eighties. Le trio est à surveiller de près. Dans une ambiance rougeâtre, c est sur des sonorites blues-rock qu’ils entament leur set. Les deux premiers singles, “City Lights” et “Lies” passent aisément l’épreuve du live. Quand au dernier single, “All of this”, tout fraîchement sorti, il constitue une parenthèse aussi tendue qu’intime. La fin du set prend la forme d’un rock trèèès abrasif et bouillant. Le genre de truc qui sent la sueur et la bière.

Nous reprenons notre périple en direction de La Vallée pour le concert du duo français de MOÏSE TURIZER. Ces deux-là sont habités par la même rayonnante folie sonore et psychédélique que les allumés d’Animal Collective qui aurait rencontré le lapin Duracell en chemin. Ca carbure et ça déroule pied au planche. De quoi vous faire danser et vous laisser avec un sourire béat sans avoir eu besoin de fumer quoi que ce soit. Mais attention, il y a chez eux des relents bien denses de post-punk et de coldwave. Ils alternent entre guitares, boîtes à rythmes et fûts de batterie. Il y a aussi quelques refrains qui auraient fait la joie des Anglais durant l’âge d’or de la britpop de Blur. Tout ça est intense et envoyer de manière aussi frontale qu’euphorique, avec un final techno-psychédélique carrément jubilatoire.

Nous restons du coté de La Vallée pour la suite de la soirée. Et c’est encore une fois un trio qui monte sur scène. Les Français de JEAN JEAN viennent présenter leur troisième album “Fog Infinite”. Cet album constitue un excellent mix entre rock instrumental et rythmes taillés pour les dancefloor. Mais un dancefloor sérieusement robuste et agité. Il y a chez Jean Jean quelque chose qu’on retrouve aussi chez M83 : des mélodies jubilatoires et un univers onirique, mais en version beaucoup plus musclée, électrique et percutante. La salle est bondée et personne ne s’y est trompé. La réputation live qui précède le groupe n’est pas surfaite. A la guitare c’est la grande frénésie sur les cordes, parfois avec des effets sombres, nous rappelant certains groupes post-rock, parfois beaucoup plus doux, toute proportion gardée. Au clavier, on donne aussi de la voix sous forme de choeurs qui sont utilisés comme un instrument parmi les autres. Et à la batterie, on retrouve un gaillard carrément habité par les rythmes, jouant les yeux et la bouche grande ouverte, comme si sa vie dépendait de chacun de ses coups de baguette. Il en résulte une musique qui prend des airs de conquête de grandes étendues sauvages, portée par une force quasi-mystique.

C’est avec les Tournaisiens d’ENDLESS DIVE que nous finissons la soirée, toujours du coté de La Vallée. Une bonne année après la sortie de leur deuxième album, “A brief history of a kind human”, et une date au Botanique (notre compte-rendu est à lire ICI), ils sont de retour à Bruxelles. On connait tout le potentiel live du groupe et nous sommes curieux de voir comment cet opus vit sur scène avec le temps qui passe. Leur post-rock énergique mais toujours mélodique ayant le pouvoir de nous embarquer lui aussi vers de grandes contrées sauvages. C’est en formation ultra-serrée que le quatuor trouve place sur scène, avec un nombre impressionnant de pédales d’effets en tout genre. Il est d’ailleurs assez plaisant de les voir évoluer dans cette configuration où ils semblent ne former qu’un seul élément.

Durant leur set, ils voyagent au sein de leur discographie avec des moments aériens et lumineux (merci la reverb des guitares) mais aussi de sacrés assauts électriques comme “La Cigue” et ses airs de “We’re no here” de Mogwai. On apprécie aussi les quelques apports de synthés qui viennent embellir encore cet univers, un peu à la manière des arrangements que l’on retrouve chez God Is An Astronaut. Après le très beau “Above the trees” et ses riffs aussi virils qu’harmonieux, c’est en toute logique qu’Endless Dive achève son set avec le titre “Au revoir”. Titre qui, au passage, est une tuerie absolue et qu’on aimerait voir s’étirer encore et encore tant la puissance de celui-ci vire à la tornade dans sa seconde partie. 

C’est sur ces derniers riffs que s’arrête donc notre périple au Ways Around Festival. Nous avons été agréablement surpris par la convivialité de l’événement où festivaliers et artistes se côtoient, discutent et boivent un verre tous ensemble avant, après et pour certains pendant le concert. On a également apprécié la diversité et la qualité de l’affiche proposée, tout en restant cohérente. Enfin, on a apprécié que les organisateurs nous sortent des sentiers battus des “grandes” salles de concert, privilégiant des lieux moins connus du grand public, et qui pourtant propose tout au long de l’année des activités culturelles, musicales et scéniques.

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