C’est à l’aube de son vingt et unième printemps que celle qui avait porté très haut les couleurs de la Belgique en 2017 à l’Eurovision avec son titre “City Lights” revient avec un premier album nommé “Empire“. Blanche, Ellie Delvaux de son vrai nom, nous a fait patienter, reportant à plusieurs reprises la sortie de ce disque, attendu aussi bien par le public que par la critique. L’adage “Tout vient à point à qui sait attendre” s’est ici révélé être exact : la demoiselle, qui a participé aussi bien à l’écriture des textes qu’à la composition des mélodies, propose un album aux sonorités pop à la fois variées, délicates et classieuses. Scènes Belges est allé discuter avec elle de la concrétisation de ce joli projet.

Scènes Belges : Quelques jours après la sortie de ton premier album “Empire”, est-ce que tu peux nous dire comment tu vas ?

Blanche :  Je suis assez contente. Ça prend vraiment bien. Les retours que j’ai sur l’album sont vraiment supers, que ce soit de la presse ici en Belgique ou des gens qui me suivent et qui l’attendaient. Ce qui est cool aussi c’est que l’album est sorti au niveau international, pas juste national.

Scènes Belges : Ton album avait été annoncé plusieurs fois et à chaque fois sa date de sortie fut repoussée. Pourquoi ?

Blanche : Après l’Eurovision, j’étais très optimiste et avec mon équipe on s’est dit qu’on allait commencer à se pencher dessus. Dès que j’ai commencé à écrire la première chanson les choses se mettaient bien en place. Tout le monde s’est un peu emballé. J’ai eu l’occasion de rencontrer pas mal de gens à cette période qui suivait l’Eurovision. Je suis très rapidement entrée en studio à Bruxelles où on a beaucoup travaillé avec Pierre Dumoulin de Roscoe. J’ai pas mal écrit avec Thomas Médard dont plusieurs chansons sont aussi sur l’album. Puis mon label PIAS m’a envoyé à Londres où beaucoup de nouvelles opportunités et influences se sont présentées à moi. Il y avait une dynamique complètement différente et ce fut l’occasion de rencontrer également beaucoup de personnes pour faire émerger des choses pour cet album. Donc déjà, en allant à Londres on a prit du retard sur le planning initial. J’ai commencé à sortir quelques titres tout en continuant à écrire depuis là-bas. Mais il fallait aussi prendre du recul par rapport à tout ce processus créatif pour pouvoir sélectionner les “bons” titres. D’où le délai aussi long.

Scènes Belges : Combien de titres ont été mis en boîte ?

Blanche : Il y en a eu une trentaine. Et logiquement toutes les chansons abouties sont sur l’album. Finalement on a retenu 12 titres. Ils correspondent à un moment et une époque de ma vie et de ma carrière.

Scènes Belges : Tu dis que les choses ont commencées à se mettre en place très rapidement après l’Eurovision. Est-ce qu’il n’y a pas eu une tentation de surfer sur cette notoriété et cette mise en avant médiatique soudaine ?

Blanche : Oui bien sûr qu’il était tentant de surfer sur la vague médiatique et que cela a probablement joué aussi parce que cela reste un business et un fabuleux tremplin. L’idée était aussi de pouvoir montrer que je faisais d’autres choses suite au succès de “City Lights”. L’Eurovision a quelque chose de très éphémère avec un pic de notoriété et d’exposition qui s’estompe très vite. Beaucoup d’artistes qui ont gagné l’Eurovision sortent des titres après leur victoire sans que les gens ne suivent. C’est très rare que le public s’accroche à eux et qu’il ait un coup de cœur sur la durée.

Scènes Belges : Pour en revenir à ton album, tu dis qu’il est important de l’écouter en entier. A l’heure du streaming et des playlists, c’est un peu à contre-courant comme approche ?

Blanche : Je pense que mon album peut s’écouter comme chacun en a l’envie. Il n’y a pas de guide. Ce que je dis, c’est qu’en écoutant l’album comme il est, c’est écouter l’entièreté du projet, dans la cohérence des morceaux entre eux, avec l’ordre dans lequel ils sont mis. Ça apporte une cohérence dans les histoires, les thèmes et les émotions de chaque titre. Cet ensemble crée une dimension particulière mais chacun peut bien évidemment s’en détacher et y donner le sens et la dimension qui est la sienne. Et chaque titre peut aussi être pris et écouté dans ce qu’il dégage individuellement.

Scènes Belges : Tu expliques aussi, à propos de cet album et en lien avec le fait de l’écouter en entier, que c’est “comme un long voyage”. Vers où, et vers quoi ?

Blanche : Je n’ai pas envie de donner une signification unique à cet ensemble, il faut que l’auditeur puisse aussi s’approprier le projet. J’aimerais que les gens puissent ressentir les mêmes choses que moi lorsque j’écoute de la musique. Ce que je préfère personnellement ce sont des musiques qui font naître de la mélancolie ou de la nostalgie, même une sorte de joie. Cela peut paraître paradoxal aussi, mais parfois, quand on écoute de la musique, ça peut nous aider à mettre de l’ordre dans les choses, à mettre nos idées au clair. Certaines notes, certains mots peuvent parfois faire émerger des émotions ou faire échos en nous. C’est vraiment là où j’ai envie d’emmener les gens. Que cela puisse aussi avoir un effet rassurant. Quand je ne me sens pas bien je compose de la musique, et ça vient contrebalancer cette énergie. La musique a aussi ce pouvoir là.

Scènes Belges : Un pouvoir thérapeutique ?

Blanche : Oui, mais pas que. Cela peut parfois avoir quelque chose de soulageant et qui fait du bien, où l’auditeur peut se laisser emporter sans penser à rien. Mais parfois, c’est l’effet inverse qui se produit et la musique vient souligner et amplifier des sentiments qui sont négatifs. Même lorsque c’est le cas, cela peut être une opportunité de mettre en lumière des choses que l’on ne veut pas s’avouer. La musique va naturellement chercher des émotions. C’est assez inexplicable et incontrôlable. Ce voyage doit permettre à l’auditeur d’aller sur ce terrain. Il peut être aussi bien introspectif dans ce que cela peut avoir de positif ou de négatif, que comme une sorte d’évasion libre de toute contrainte.

Scènes Belges : Voyage plus mélancolique ou joyeux alors sur cet album ?

Blanche : Je dirais qu’on est plus dans la mélancolie. Mais qui n’est pas forcément quelque chose de négatif à vivre et à ressentir. Ce qui est sombre peut être porteur d’espoir et de lumière.

Scènes Belges : D’un point de vue plus technique, on a l’impression que tu as pu utiliser ta voix dans d’autres registres que celui avec lequel la majorité des gens t’ont découvert sur le titre “City Lights” où ta voix est très reconnaissable ?

Blanche : Oui. Ce que je m’amusais à faire quand je cherchais des mélodies pendant la composition de l’album, c’était d’aller chercher des mélodies en jouant avec ma voix, tout en sortant de ma zone de confort. J’ai vraiment pu explorer de nouvelles choses avec ma voix. C’est pour ça qu’on retrouve des sonorités parfois plus en lien avec le rap, ou alors des notes hautes et plus tenues, ou très pop aussi. J’en suis assez fière.

Scènes Belges : Pierre Dumoulin qui avait écrit “City Lights” est de retour sur plusieurs titres de cet album. C’était une évidence ?

Blanche : Pendant toute la campagne autour de l’Eurovision, toute l’attention s’est concentrée sur ce titre. Et ce fut parfois un peu frustrant car on avait envie d’aller plus loin dans cette collaboration créatrice qu’on avait entamé avant l’Eurovision, avec plusieurs démos notamment. On avait hâte de pouvoir écrire ensemble.

Scènes Belges : L’album commence avec un morceau d’intro où tu répètes de manière presque hypnotique “Fever for people”. Pourquoi ?

Blanche : Fever est à comprendre au sens émotionnel du terme. Cet album est porté par l’idée de se laisser atteindre et toucher par des émotions. Pour toute une série de personnes les émotions sont quelque chose à rejeter à tout prix. Ce serait, selon eux, une faiblesse que de se laisser porter par ses émotions. Ce message d’introduction est extrait du titre “Empire” et il était important que ces mots se retrouvent à l’entame de l’écoute de l’album, au regard de ce qui est proposé tout au long de celui-ci. C’est une sorte d’avertissement pour prévenir l’auditeur de ce qui va se passer. Et pour moi, les émotions sont une chose que je ne rejette pas du tout.

Scènes Belges : Petite retour en arrière maintenant : l’année passée tu jouais au Brussels Summer Festival sur la Scène située aux Monts des Arts. Il y avait beaucoup de monde ce soir là qui était venu pour toi. Comment avais-tu vécu ce moment ?

Blanche : C’était un événement qui tombait pendant la préparation de l’album. C’était un moment qui m’a vraiment fait plaisir parce que je pouvais présenter au public ce que je préparais. Je suis souvent un peu pessimiste au premier abord et je préfère me dire qu’il n’y aura que deux personnes devant la scène à m’attendre pour finalement me rendre compte que la plaine est remplie, comme ce fut le cas ce soir là. C’est juste incroyable.

Scènes Belges : Double dernière question : tes coups de cœurs musicaux internationaux et belges du moment ?

Blanche : Il y a un album que je viens de découvrir il y a peu de temps. C’est la chanteuse anglaise Lapsley. Elle vient de sortir un album qui s’appelle “Through Water”. C’est pile-poil le style que je kiffe. J’aime beaucoup aussi Feu!Chatterton avec leur style parlé très théâtral. Je sais que c’est un style controversé mais il y a plein de groupes qui évoluent dans ce genre un  peu “chanté-parlé” comme Fauve qui m’a amené vers ce courant musical là. Il y a une sincérité émotionnelle et sentimentale qui me transporte.

Et au niveau de la Belgique j’aime beaucoup Tessa Dixson dont l’album est vraiment cool. Mais il y a trop d’artistes que j’apprécie en Belgique pour tous les citer, aussi bien du coté francophone que néerlandophone du pays.

Pour rappel, Blanche sera en concert au Club de l’ANCIENNE BELGIQUE le vendredi 11 septembre 2020. Une autre projet live inédit est en cours de gestation mais il est encore trop tôt pour en parler. On tiendra ça à l’œil…

Son album “EMPIRE” est sorti chez PIAS, il est disponible ICI en version physique, digitale et en streaming sur les plateformes habituelles.

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