Il fait encore plus chaud que la veille, mais les festivaliers répondent présents aux petites heures de l’après-midi. La programmation de ce samedi fait écho au fameux “Bruxelles arrive!” de Roméo Elvis & Caballero : en effet il faut dire que les artistes de la capitale sont venus en nombre aujourd’hui ! Avec entre autres Angèle, Juicy, Beautiful Badness, Sarah Carlier, Isha, Caballero et JeanJass, Mustii.
Il fait déjà une chaleur à crever quand Trois Café Gourmands fait son arrivée sur la scène de l’Esplanade. Le groupe programmé relativement tôt dans l’après-midi rassemble petits comme grands autour de mélodies joyeuses et rêveuses. Le public tape dans ses mains aussi fort que le soleil tape sur nos têtes, c’est pour dire !
Très belle découverte ensuite avec Beautiful Badness, et les impressionnantes qualités vocales du chanteur, qui tant dans son attitude, allure, ou encore timbre vocal, n’est pas sans rappeler un regretté Freddy Mercury. La maîtrise vocale, d’influence certes classique, mais osant s’aventurer sur le terrain du rock, du jazz ou du gospel, est parfaite ! On se laisse tout simplement aller au gré des morceaux, tout en sirotant une bonne Houppe bien fraîche. Le groupe ose même une reprise du célèbre titre de The Rembrandt (« I’ll be there for you ») en ralentissant le tempo original, et en y ajoutant des harmonies absolument délicieuses. Ces quatre bruxellois nous ont offert un concert intéressant, mélodique et surprenant.
Bruxelloises de cœur et d’origine, les copines à l’initiative du duo Juicy, viennent à leur tour enflammer l’Esplanade, sous une chaleur toujours aussi écrasante. Chaleur qui aura eu le dessus plusieurs fois en ralentissant leurs ordinateurs pourtant bien protégés. Malgré ces petits soucis techniques, Juicy assure un live de qualité, quelque part entre un hiphop underground et des voix qui passent de sonorités orientales à des flows d’enfer. Toutes de latex vêtues, on se demande encore comment elles ont tenu avec ces conditions météo !
Pendant ce temps, la scène du Maquis, sur les dessus de l’ancienne Citadelle si chère aux namurois. Cet espace est, ce samedi, entièrement dédié aux “musiques urbaines”, où on y retrouve notamment Isha. Sa plume est aussi aiguisée qu’un couteau de cuisine, on y retrouve des textes francs-parlés, sans tomber dans des leçons moralisatrices. La production est intelligemment étudiée, et nous restons finalement jusqu’à la fin du concert, qui nous a positivement interpellés.
Au Belvédère nous retenons la prestation joyeuse et souriante de Sarah Carlier, à la voix d’or, et secondée par une équipe à la technique impressionnante. Un guitariste sobre mais juste, d’une grande sensibilité, enrobe les mélodies de la chanteuse tandis qu’un batteur précis, magnifiquement en place, jazzy à souhait en ponctue les propos. A cela s’ajoute un bassiste-claviériste qui tapisse une solide toile de fond. Belle découverte, à nouveau, et une artiste assurément à suivre.
A peine le concert fini au Belvédère, on file illico-presto à l’Esplanade qui commence à se remplir de tous les côtés pour les vaillants Caballero et JeanJass ! « Bruxelles arrive », c’est le cas de le dire ! Les compatriotes envoient du lourd au milieu de leur garage aménagé sur scène, agrementé d’une voiture en plein milieu. Le rap se confond avec des sonorités hip-hop, et se fond dans de très lourdes basses. Les fans « pogotent » dans tous les sens, ça danse, ça boit des coups (avec modération) gaiement : on valide l’ambiance bouillante à laquelle on participe avec plaisir !
Après une pause fraîcheur à l’intérieur du tunnel (duquel on a pas encore parlé), qui offre aux festivaliers une exposition unique, il est temps de remonter vers le Belévère (ça en fait des marches en une journée !). Aurelio Mattern, membre du groupe Sonnfjord, vient en solo aujourd’hui aux Solidarités sous le nom d’Aurel. Demain, il sera avec Sonnfjord sur la scène du Maquis, mais pour l’heure écoutons ce que le chanteur a à nous dire ! En français dans le texte, le chanteur fascine et interpelle un public de tout âge avec des chansons remplies de nostalgie, ou par contraste, avec des textes profonds et engagés. On retrouve évidemment une production similaire au projet du groupe, mais la voix masculine l’emporte dans une autre dimension ; et emporte, le public lui aussi, dans une autre dimension.
Sans surprise, une foule dense et compacte se presse maintenant sur une Esplanade noire de monde (et soudain trop étroite), pour assister au concert d’Angèle . Pantalon doré scintillant de mille feu, parures en or sur son t-shirt blanc, arborant une énorme mitraillette (gonflable) tout aussi dorée, Angèle illumine l’immense scène par sa seule présence. Les chorégraphies millimétrées mais intelligemment étudiées apportent un très beau visuel au show, qui est surplombé par deux yeux “à la Jean-Michel Folon“. Tout est très formaté, étudié, ne laissant aucune place à l’improvisation. Le public, conquis par avance, chante absolument tout, tâche d’autant plus aisée que le concert reste somme toute assez proche des versions de l’album.
A la fin du concert, nous avons eu droit à une magnifique reprise en piano-voix, d’une chanson de Dick Annegarn intitulée « Bruxelles ».
Quittant Angèle pour gagner le Théâtre de Verdure déjà bondé, nous parvenons enfin à trouver une place pour le set de Charlie Winston. Ouf ! Comme d’habitude, les morceaux s’enchaînent avec tendresse, humour, et dynamisme. Quant aux surprises, il y en aura plusieurs. A la folie de Charlie, sautant sur à peu près tout ce qui peut supporter son poids, s’ajoute l’irruption de sa toute jeune fille pour une danse endiablée et pleine de tendresse, ou encore une longue balade au sein du public, armé d’un simple néon. Pour son dernier concert de festival d’été, Charlie Winston nous offre tout, partageant son énergie, sa bienveillance, son amour de la musique, son plaisir d’être là parmi nous, avec ses deux musiciens, tout en oubliant l’heure et s’étendant bien au-delà de l’horaire prévu.
Reste à aborder Mustii, annoncé comme “special summer show”, à la demande express des Solidarités. Thomas Mustin a mis le paquet, effectivement, pour son show électro destiné à clore cette seconde journée en apothéose. Fidèle à lui-même, Mustii vit intensément son rôle, comme “habité” par son personnage. Tout est très théâtral, avec des poses très affectées, des mouvements amples accentués par une ample cape noire pailletée. Laser, effets pyrotechniques, jets de flammes et de fumée, en enfin envol de l’artiste vers les cintres, suspendu dans le vide au-dessus du logo omniprésent “21th Century Boy”. Tout est mis en œuvre pour faire de ce show grandiose un moment fort de ce festival.
Par : Eric Beaujean & Solenn Gousset