13 000 personnes, une vingtaine de chanteurs et chanteuses inoubliables, un temps clément et une irrésistible envie de fête. Voilà le menu qui était proposé ce dimanche de fête de la musique à Namur. Et si l’été est à l’image de ce premier jour de la saison et de ce moment de trois heures, il sera assurément réussi. Chaleur eighties!
En voyant la gueule du ciel ce matin et sa drache nationale, je ne peux me dire qu’on a eu de la chance hier soir, sur le parking de la Caserne de Namur gonflé de 13 000 spectateurs formant un public sans âge si ce n’est celui du moment présent. Beaucoup de chance qui n’avait sans doute rien du hasard tant, dès les premiers instants, le bonheur brillait dans les sourires et les cœurs de ces idoles intemporelles de Stars 80: Jean-Pierre Mader, Émile et Images, Cookie Dingler, Julie Piétri, Début de Soirée, Pauline Ester, Sabrina, Alec Mansion, Patrick Hernandez, François Feldman, Phil Barney, Lio, Jean Schultheis, Laroche Valmont, Patrick Coutin, Jean-Pierre Morgand (leader inoubliable des Avions) et, en invité de marque, Jimmy Somerville.Rien que ça pour un voyage survitaminé dans des années délires et d’insouciance. C’était juste hier, les années 80, pas plus loin que ça, même pour un gars né dans les années 90.
Bon d’accord, j’avoue, quand l’événement fut annoncé, en dépit de l’exceptionnalisme et de la grandeur de ce concert à Namur (digne d’un concert de Johnny), j’étais tiède. Ou plutôt j’avais peur (comme Feldman, fût un temps). Peur d’une grande messe sans vie, peur du playback, peur de voir mes idoles d’une décennie blâmée par un temps inexorable. Et puis, j’ai vu le show à TF1, ébahi: du live, une énergie et une sincérité inébranlables, tous présents pour un show ne laissant rien à la facilité. Après ça, pas le choix, Namur, je devais en être.
Et hier, j’y étais (une fois passé la fouille intempestive, m’ôtant ma bouteille d’eau payée 0,21€, pour mieux nourrir la poubelle et, moi, racheter la même bouteille à…2,5€; soit quasiment 12 fois plus cher). Bien placé dans une foule compacte et heureuse d’être là, entre boule-à-facettes, immenses perruques, rouflaquette et costumes argentés. Si les Stars ne sont pas encore là, le public est bel et bien là, proactif. Moi, j’ai perdu toutes mes appréhensions, la soirée sera bonne.
Prévue à 21h, la soirée démarre plus tôt que prévu avec, déjà, un magnifique hommage à Gérard Blanc et son Autre Histoire, en collégiale, tous à l’unisson. L’émotion est là, les poils se hérissent un peu sous le poids d’une nostalgie d’un temps que je n’ai pas… connu (et ça aurait été loin de me déranger que de vivre ces années folles). Puis, il y en a d’autres, plus jeunes, des enfants, des minots, amenés là par leurs parents et qui n’ont pas l’air de s’ennuyer le moins du monde: ils en prennent plein les mirettes, tellement le show est réussi. Julie Piétri, Émile et Images, en chair et en os, ils n’ont pas vieilli. D’autant, qu’ils arrivent sur scène, mis en valeur par un spectacle des grands soirs, affûté dans des chorégraphies intenses servies par des danseurs magistraux. Danseurs qui, pour le coup, devaient être bien jeunes dans les années 80 et ont leur petit succès. Dont un, déshabillé par les danseuses de Pauline Ester et de son « Oui, je l’adore », dont les spectatrices rêveront encore longtemps.
Puis, Stars 80, c’est autre chose qu’une suite sans âme de chansons populaires que les fans chantent désormais mieux que les stars sur scène. Que nenni, non seulement, les chanteurs et chanteuses n’ont rien perdu de leurs capacité et pouvoir vocal, mais ils s’adonnent aussi à la recréation fantastique d’une époque. Car Stars 80, c’est une réelle troupe, avec des airs de Broadway et des tableaux-medley dans le style de ceux proposés par les Enfoirés (la chanson des Restos fut d’ailleurs reprise en collégiale): un puissant medley sur du hard-rock, du vrai (Phil Barney avec la classe-uppercut d’un Rocky Balboa, Highway to… Émile (de Gold et Émile et Images) et William de Début de Soirée pour Antisocial), d’autres sur les Rita Mitsouko ou d’autres chansons coups de coeur (et un Patrick Coutin qui crève décidément bien l’oreiller de Bashung) et un magnifique best of feldmanien en piano-voix. Le tout agrémenté de séquences d’archives nous balançant un peu plus encore dans cette décennie de paillettes.
De ce Stars 80-là, on pourrait encore en parler longtemps (d’ailleurs, c’est ce qu’on fera!): du « C’est…Namur » d’Alec Mansion (et la Petite Gayole apprise au présentateur du concert) à la choriste de luxe de Lio – sa fille -, en passant par l’euphorie toute masculine autour de la prestation de la sex-symbol Sabrina et l’émotion qui brillait, tout au long du concert, dans les yeux d’un public de plus en plus motivé (on dit que les namurois sont lents mais quand ils sont dedans, vous savez!). Et tous ces grands chanteurs marquants de ne pas faire défaut au rendez-vous, à la hauteur de l’événement et fidèles aux générations qu’ils ont marquées, durant plus de trois heures(!) de show.
La conclusion nous la laisserons à Jean-Pierre Mader, qui (ne voulait pas) fêté par le public pour son anniversaire: « Le temps a glissé sur moi. Je ne l’ai pas vu les années passer grâce à la musique, aux chansons et à vos vibrations. » Et le chanteur toulousain d’espérer être encore bien là dans dix ans. Nous aussi et même bien avant! Car la preuve est acquise, résolument, que les années 80 sont peut-être plus vibrantes que jamais, éternelles dans leur kitsch, leur bling bling, leurs formidables hymnes et leur force à réunir des milliers de personnes. Et des moments comme ça, ont-ils un prix? Aucun! Encore moins quand on faisait partie, hier, des rangs du public de Namur, propulsé par Mario d’Emile et Images, « meilleur public d’Europe ». Et entraînés par les « démons de minuits, jusqu’au bout de la nuit », dans « une nuit sauvage » bien belle pour ses otages bienheureux, « confidences pour confidences », dieu de la musique qu’on a aimé cette transe!