Samedi soir, Roméo Elvis & Le Motel ont chauffé à blanc un Bota plein à craquer, quelques jours à peine après la sortie de leur nouvel album : Morale 2. Réunissant toute la galaxie gravitant autour du nouveau prodige de la scène rap bruxelloise, ce concert incarnait le point d’orgue d’une tournée ascensionnelle. Retour sur une soirée incendiaire.
Roméo Elvis est un lion dans l’arène, un MC baryton, un bonhomme au charisme inversement proportionnel à la superficie de notre plat pays. En trois punchlines et un tombé de t-shirt, il transforme les clubs en cratères magmatiques et fait onduler n’importe quelle foule avec l’intensité d’un cardiogramme sous ecstasy. Pas étonnant donc que l’Orangerie, salle emblématique du Botanique, affichait soldout ce samedi.
Premières parties : Angèle et Le 77
Sérieux, pour seulement 15 balles, on peut dire que le public en a eu pour son pognon. Avant l’arrivée du Roméo, deux premières parties de qualité – mais surtout de circonstance – offrent une mise en bouche et en jambe adaptée. C’est Angèle, la petite soeur de Roméo, qui allume les projecteurs de l’Orangerie. Sa voix à la fois tintante et feutrée, que l’on retrouve d’ailleurs sur l’album du frangin (J’ai Vu), porte une pop-electro-jazzy – yes, tout ça ! – qu’elle applique principalement à des covers variant les styles, de Brassens à Annegarn, avec une patte bien léchée. Et bien à elle ! Le tout agrémenté d’humour décontracté. Petit coup de coeur.
Vient ensuite Le 77, collectif hip-hop issu d’une collocation ixelloise dont il tire son blaze et dont le premier EP (C’est le 77) est dispo depuis octobre en téléchargement libre. Premier contact pour moi avec cette formation qui revêt encore dans ma bouche le goût d’un vin fraichement débouchonné dont il faudra à mon palet quelques lampées de plus pour que je puisse réellement dire ce que j’en pense… À la fois propre et puissant, s’inscrivant dans la mouvance actuelle du rap bruxellois, le groupe me laisse cependant le sentiment de surabuser quelque peu des codes du genre, freinant peut-être le développement de sa propre ‘touch’. Ceci dit, autour de moi, tout le monde semble conquis. Le collectif, intégrant entre autre Félé Flingue de L’Or du Commun, crame aisément les planches et les cerveaux à grands coups d’un son jazzy écrasé de basses trapues.
Courte pause. Le temps d’un aller-retour au bar. Il est maintenant 21h30 et Roméo Elvis monte sur scène, tandis que Le Motel vient de s’installer derrière ses platines. Nappeux, Sabena et Diable, titres tout trois sortis de Morale 2, entament un set largement rodé et éprouvé. La voix grave et puissante de Roméo, tantôt chantée tantôt rappée, caresse la trap soutenue de son acolyte, devant un millier de paires d’yeux écarquillés de plaisir, artificiel ou non. C’est l’arrivée de Primero, membre de L’Or du Commun qui accompagne Roméo sur sa tournée, qui fout réellement “la Californie dans le club”. Comme d’hab, son flow claque juste, se fait parfois rafale et répond au gras débit du MC baryton en lui donnant du corps. Primero n’est que le premier d’une longue liste d’invités qui viendront garnir les planches au fil des morceaux : le guitariste de YellowStraps, un poto du Motel, accompagne Roméo à la guitare sur Drôle de Question; Angèle remonte sur les planches pour incarner le fraternel duo J’ai Vu; Swing et Loxley vienne compléter la formation de L’Or du Commun pour notre plus grand kiff; et tandis que les paroles de Bébé aime la drogue résonne dans la salle, je me fais bousculer par Marka – le daddy du petit Roméo Johnny Elvis Van Laeken, de son vrai nom, sa maman n’étant autre que Laurence Bibot – qui fend la foule les mains chargées de cartouches de houblon… Décidément, toute la smala est réunie ! Une véritable débauche de guests.
Le temps passe et la température monte. Tout ce petit monde sautille frénétiquement sur scène et met la foule à feu et à sang, à grand coup de beats organiques, d’humour très second degré, de provocation bien dosée et de “mosh pit” version trap.
On est à Bruxelles, les gars ! Vous êtes sensés être tout pétés, là ! On était à Anvers la semaine dernière et ils étaient bouillants ! Vous êtes plus chauds que les flamands, les gars ?
Le jeune prodige, du haut de ses 24 ans, nous aura offert un inégalable show, alternant entre énergie pure et phases narratives (La voiture et La valise). Roméo assure le tout avec chaque partie de son corps, faisant preuve d’une incarnation physique de ses prods. Si celles-ci peuvent parfois laisser certains auditeurs perplexes en version album, elles sont décidément taillées sur mesure pour la scène. Les fascinantes et élastiques expressions faciales du performeur durant Les hommes ne pleurent pas ne mentent pas. Roméo termine le concert torse nu, ses cheveux luisants de sueur battant un corps sec et musclé. Un déhanché simiesque et de longs bras fendent l’air et impulsent les vagues qui animent la marée humaine devant lui. Et c’est bien évidemment entouré de Caballero (et de tous les autres guests qui ont participé à la fête) que le set se clôt sur Bruxelles Arrive, tube de l’été 2016 qui les a propulsés en orbite. Déluge apothéotique d’amour et d’énergie.
La hype Roméo Elvis n’est visiblement pas prête de retomber…
Prochaines dates de Roméo Elvis
UZINE FESTIVAL SPRING EDITION – 01/04
Le Reflektor – 13/04
SAINT LOUIS FESTIVAL – 22/04
INC ROCK – 28/04
COULEUR CAFE – 02/07
LES ARDENTES – 07/07