Après des mois de silence, c’était avec une tristesse non feinte que nous apprenions, en juillet dernier, la reconversion du Jyva’Zik Festival. Les organisateurs, via la page leur page Facebook et leur site Internet, annonçaient la fin de cette belle aventure et le début d’une nouvelle : la création de la première conserverie artisanale “Terre et Mer” du Brabant-Wallon. Fini la musique décalée, les spectacles burlesques et décadents, place aux rillettes!
Avec pas moins de quatre rillettes disponibles initialement (la gamme de rillettes disponibles ayant été étendue jusqu’à huit par la suite), il s’agissait là d’un changement radical pour le Jyva’Zik. Le site Internet de l’évènement avait d’ailleurs subi un relooking complet pour l’occasion. À la place des shows burlesques, du cabaret, des combats de catch et des concerts, une vie coopérative, des rillettes et des producteurs locaux.
Pourtant, alors que l’on commence se faire une raison et à se dire que Jyva’Zik Festival, c’est bel et bien terminé, une mystérieuse page contenant des instructions pour accéder à une section secrète sur le site du Jyva’Zik fait son apparition en septembre dernier! En suivant celles-ci, on arrive sur une partie clandestine du site qui nous annonce que le festival aura bel et bien lieu, sous forme de déstockage massif. Ainsi, les 3 et 4 novembre derniers, le cargo Don Michel faisait escale à Court-Saint-Etienne, ses cales chargées de rillettes, pour un déstockage pas comme les autres!
Nous voici finalement devant le PAM Expo le vendredi 03 novembre, lieu choisi par le capitaine Higuette pour faire escale avec le Cargo Don Michel. Des cris de mouettes nous escortent tandis qu’on pénètre dans l’imposant cargo et qu’on descend dans ses cales où se tient le fameux déstockage. Mais une fois à l’intérieur, point de rillettes et autres terrines en conserves. Non, on y retrouve l’univers formidablement décadent du Jyva’Zik!
Quelle joie de retrouver cet évènement clandestin! Heureusement que, comme tous ces messieurs, on a sorti nos plus belles bretelles et notre plus belle moustache, tandis que ces dames, accompagnées de rivières de perles, de boa et autres accessoires des années folles évoluent avec grâce à nos côtés. On y croise de temps à autre un matelot de l’équipage du cargo Don Michel, mais surtout, le gratin de l’époque.
Pour les retardataires qui n’auraient pas eu le temps de se mettre sur leur trente-et-un, une équipe de barbiers, venue tout droit du Ciarro’s Barbershop, était présente et officiait gratuitement pour donner un coup de fraicheur à la pilosité de ces messieurs. Pendant ce temps, ces dames pouvaient se refaire une beauté chez une coiffeuse pour dame. Toute cette belle équipe était épaulée par Kimmy, une tatoueuse proposant pour l’occasion des tatouages éphémères et originaux de l’époque.
Dans les cales du cargo Don Michel, on notait également la présence de quelques personnages hauts en couleurs comme ceux participant au jeu de rôle mis en place par l’équipage. Pour celui-ci, un personnage avec un objectif vous était attribué sur base de vos réponses à un questionnaire disponible sur la partie clandestine du site du Jyva’Zik. Il vous fallait alors l’atteindre, en comptant sur l’aide de vos alliés et en déjouant vos ennemis! De quoi pimenter vos soirées dans les cales du cargo!
Pour les autres, de nombreux divertissements étaient également prévu. On y retrouvait comme à l’accoutumée le cinéma muet. Celui-ci, tenu par Pablo, le projectionniste, proposait une belle sélection de films de l’âge d’or du cinéma muet, allant d’Orson Welles à Robert Flaherty, en passant par les frères Lumière ou encore Sergueï Eisenstein et Robert Wiene.
Si vous cherchiez du sensationnel, en explorant de manière un peu plus poussée les cales du cargo Don Michel, vous pouviez tomber sur l’une ou l’autre petite surprise. Pour peu que vous passiez au moment opportun au bon endroit, comme devant l’entrée de la salle des machines a des heures précises, quelques personnages étranges pouvaient vous inviter à pénétrer dans des lieux secrets, connus uniquement des plus avertis! On repensera par exemple à la démonstration des fameux élixirs de la famille Bouffard, parmi lesquels on retrouvait leur célèbre potion vous donnant une force herculéenne, comme ils nous en firent la démonstration!
Si l’absence des fameux combats de catch se fit un peu sentir, l’apparition d’une troisième scène combla à merveille ce vide! Nommée la Capitainerie et affublée d’un gigantesque phare, celle-ci abritait de nombreuses animations comme les traditionnelles initiations à la danse, mais aussi quelques groupes ayant embarqués à bord du cargo, tel que The Rhum Runners, ou l’Amicale de la Nouvelle Orléans. Présents les deux soirs, ces deux groupes firent virevolter les danseurs les plus motivés à grands coups de Rock’n’Roll typique de l’époque pour les premiers, et d’un jazz dansant pour les seconds. Même les marins les plus endurcis ne peuvent y résister et se laissent emporter avec délice par cette vague de sonorités qui vous donnent envie de vous trémousser, encore et encore!
Histoire de pimenter un peu la soirée, et pour réchauffer l’atmosphère dans des cales déjà surchauffées par un nombre toujours plus grand d’amateurs de rillettes, on retrouvait avec plaisirs quelques visages bien connus de la scène burlesque, grands habitués du Jyva’Zik! Tandis qu’à la capitainerie, on retrouvait entre deux concerts, de nombreux visages familiers, comme la belle Colette Collerette, la douce Miss Anne Thropy, ou encore l’incroyable Flying Willy, quelques nouvelles têtes font également leur apparition sur la scène du cabaret.
Cette scène est transformée cette année en bar à alcools et scène orientale tenue par la célèbre Kikumaru, qui nous proposera des shows burlesques délicieusement décadents et osés! Présentés par Russel Brunner, également performeur et surnommé le “Roi du Burlesque“, qui est accompagné pour l’occasion de Lalla Morte et de ses shows envoutants (elle-même secondée par Sep Vermeersch qui nous livrera un show plus extrême mais inoubliable), d’Erochika Bamboo, mondialement connue comme la “Tokyo Tornado“, ainsi que la grande Natsumi Scarlett, qui nous séduira par ses prestations plus chaudes mêlant pyrotechnie et inspiration voodoo!
Enfin, comme chaque année, nous avons le plaisir de voir défiler sur la grande scène quelques-uns des groupes les plus en vogues de la scène électro-swing! On retrouvait dès lors le vendredi soir : Hapa Haole Vestibule, groupe belge mixant avec brio les mondes créoles, le tango parisien et le swing argentin pour un résultat détonnant et festif aux accents ensoleillés; The Summer Rebellion, duo diablement efficace composé d’un accordéon et d’une batterie auquel on doit d’ailleurs la bande son des vidéos promotionnelles de la conserverie; et finalement GinkGoa qui clôture la première soirée de ce déstockage pas comme les autres à coup d’une chanson française-américaine surboostée aux beats électro inarrêtables!
Le second jour voit quant à lui se succéder Radio Tour, groupe de jeunes virtuoses du jazz qui nous feront redécouvrir de grands courants du style; High Jinks Delegation et leur mélange de styles aussi improbable que brillamment réussi, allant du jazz au blues en passant par la country ou encore le ragtime; The Speakeasies Swing Band, LE groupe de la soirée pour moi qui aura le plus fait danser les foules, avec ce mix jazz-swing si particulier et agréable à l’oreille qui ne peut que vous entrainer jusqu’au bout de la nuit!; et finalement, Jhonny Montreuil qui nous conte cette banlieue pourrie sur des airs détonants et incisifs à grands renforts de contrebasse, violon, et d’harmonica!
Si, durant mes pérégrinations dans les cales du cargo Don Michel, j’ai eu la joie de pouvoir profiter également des merveilleux mixs de chansons vintages et décalées du “Silence, on danse!” orchestré d’une main de maitre comme chaque année par le collectif Gomazio, je reste un peu déçu. Pourquoi? Car je n’ai malheureusement pas réussi à mettre la main sur les fameuses rillettes! Quelle ne fut pas ma déception de ne pas les trouver au menu de la cantine mise en place! Étaient-elles cachées ailleurs dans les cales? C’est une bonne question! Toujours est-il que j’aurais vraiment aimé avoir l’opportunité de gouter celles-ci à bord du cargo Don Michel! Mais ce n’est rien car malgré ça, comme vous l’avez bien compris, ce déstockage, bien qu’étrange, c’est de la folie!