Jeudi dernier, les Nuits du Botanique ouvraient leurs portes avec un line up de choix sous les premières douceurs d’un printemps tardif. Entre la pop franco-futuriste de Isaac Delusion ou Las Aves, le rock psyché de Last Train et Moaning Cities, les textes harmonieux de Albin de La Simone et ceux, plus sombres, de Mathias Bressan… il y avait vraiment de quoi faire ! Mais de notre côté, on a décidé d’ouvrir le bal avec un grand classique de la scène belge, j’ai nommé Daan.
On arrivera malheureusement un peu trop tard au Chapiteau des Nuits pour profiter pleinement de l’electro-pop new wave mélancolique de l’artiste suisse Sandor, nouveau visage de la chanson romande. C’est donc sur les terres versatiles et colorées de la République Démocratique de Kadebostany qu’on fera nos premiers pas dans le petit marathon-concerts que vont être ces Nuits Bota 2017. Kadebostany, c’est une contrée tout droit sortie de l’imagination du producteur suisse Kadebostan (alias Guillaume Bozonnet), qui se présente fièrement comme ambassadeur d’une nouvelle ère pop. Durant près d’une heure, nous avons droit à un set millimétré garni d’un light show adapté qui sait se faire épileptique quand il faut. Sur scène, les artistes, aux allures raffinées, ne cessent d’étonner par les configurations qu’ils enchainent, jonglant entre DJ, cuivre, batterie, basse, tambour, drumpad… Le tout appuyé par les envolées lyriques et perçantes de Kristina, la chanteuse. L’immersion est intense, progressive, et s’accentue sous le coup de percussions lourdes et profondes, évoquant de tant à autre le côté épique de Woodkid. Une scène inondée de fumée, percée de stroboscopes, et les artistes se transforment en ombres, errant dans les méandres de leur pays imaginaire. On retiendra notamment cette reprise déjantée de Heroes de Bowie, sous la houlette du complètement barré Président ‘DJ’ Kadebostan, dont la moustache n’a rien à envier à celle de Günter.
On fait une petite halte dans le Jardin Botanique – qui n’est jamais aussi agréable que sous la douce effervescence des Nuits, une Affligem à la main – et on attaque le gros morceau de la soirée. C’est un Daan un peu cramé, qui vire délicieusement destroy avec l’âge, qu’on retrouve ce soir sur les planches du Chapiteau, affublé de lunettes noirs et d’une longue tignasse de cheveux libres et éprouvés. En novembre dernier, Daan nous revenait d’un voyage régénérant en Espagne, après une période de passage à vide. Il nous livrait alors NADA, fruit succulent de son isolement salvateur. Un album organique écrit sur base de paysages sonores, sans contexte, sans pression du public, même pas destiné à être entendu par d’autres (pour le coup c’est loupé…). C’est donc une Americana sombre, personnelle, roots, teintée de blues et de grooves impressionnistes, que Daan nous offre sur scène aujourd’hui. Le show est vierge de toute mise en scène, le light show est quasiment statique, voir inexistant, mais il y a quelque chose de brut et de spontané qui emporte rapidement le public.
Après quatre morceaux, le crooner flamand finit par ôter ses lunettes de soleil et l’interaction se fait plus personnelle. Daan parsème son set d’anecdotes contextuelles sur les morceaux qu’il joue, embobinant le public de ses charmes nonchalants, allumés, ainsi que de son délicieux accent et ses approximations linguistiques.
Ce morceau, je l’ai fait dans le désert, heu dessert. Désert? Non, désert. Et après un certain temps on devient un peu fou. Du coup, on fait des trucs bizarres, comme ça…
Daan bonifie et prend du corps avec l’âge, comme les bons vins. Et ses musicos – dont l’excellente Isolde Lasoen à la batterie, qui nous offre quelques belles envolées – semblent avoir décidé de lui emboîter le pas. Le concert se terminera sur quelques inévitables classiques, tels que Icon et Exodus. Ainsi qu’un rappel très court sur Victory, repris en choeur par un public enchanté.
J’ai encore deux minutes à faire, contractuellement. Mais va falloir que vous m’aidiez…
On quitte les lieux ravi de cette première soirée des Nuits 2017, tout excité à l’idée du line-up impressionnant qui s’étale sur les deux semaines à venir. On ne manquera bien évidemment pas de vous raconter cela en détail sur Scènes Belges !